Droit des étrangers : des modifications en cascade

Deux projets distincts qui relèvent du droit des étrangers entreront en vigueur prochainement : les dispositions relatives à la gestion de l’immigration entrent en vigueur au 1er juillet 2018. Un second projet qui concerne l’intégration et ancre dans la loi la maxime « encourager et exiger » entrera probablement en vigueur en début 2019 [1].

Un premier projet a modifié la loi et de nombreuses ordonnances pour répondre à l’initiative UDC du 9 février 2014 « contre l’immigration de masse »  : c’est dans ce cadre que l’obligation posée aux entreprises d’annoncer des postes vacants dans les domaines à fort chômage a été introduite[2]. Les réfugiés reconnus et les personnes admises à titre provisoire qui cherchent du travail seront annoncés au service de l’emploi[3]. Les conditions à remplir pour pratiquer le commerce itinérant ont été revues[4].

Le projet durcit en outre les conditions d’octroi d’indemnités de l’assurance-chômage pour les Suisses et les étrangers de retour en Suisse après un séjour à l’étranger : en plus d’une activité lucrative à l’étranger, ces derniers devront justifier de six mois de cotisations en Suisse avant de toucher des prestations du chômage[5].

Les conditions d’octroi et de prolongation des permis de séjour (B) et d’autorisation de courte durée (L) se durcissent également : les caisses de compensation devront, à partir du 1er juillet 2018, communiquer d’office les données des étrangers qui reçoivent des prestations complémentaires fédérales : le versement de PC pourra constituer un motif de non-prolongation ou de révocation d’une autorisation de courte durée et de séjour[6]. Enfin, l’ajout de l’article 61a à la Loi sur les étrangers raccourcit le délai de perte de permis des ressortissants de l’UE ou de l’AELE titulaires d’un permis L ou B qui se retrouvent au chômage.

Les secondes modifications législatives ancrent les exigences et les mesures prises pour encourager l’intégration. Ces dispositions entrainent un changement de dénomination de la loi sur les étrangers, qui s’intitulera la Loi sur les étrangers et l’intégration (LEI). L’ordonnance relative au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA) sera modifiée et l’ordonnance sur l’intégration des étrangers (OIE) fera l’objet d’une révision totale. La date d’entrée en vigueur de ces dispositions ne sont pas encore connues.

Les nouvelles dispositions instaurent un financement de mesures qui favorisent l’intégration d’étrangers et de personnes relevant du droit d’asile[7]. Ensuite, elles fixent une exigence en matière d’intégration, dont les critères sont définis par la loi. Il s’agit du respect de la sécurité et de l’ordre publics, des valeurs de la Constitution, des compétences linguistiques ainsi que de la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation[8].

Une intégration suffisante devient une condition pour obtenir un permis d’établissement, le conserver ou le retrouver[9] ; ou encore pour octroyer le regroupement familial ou encore pour que les personnes qui arrivent à titre du regroupement familial puisse obtenir un permis C ou conserver le permis B[10].

Par ailleurs, il devient impossible de prétendre au regroupement familial lorsque la famille dépend de l’aide sociale, de percevoir des prestations complémentaires ou d’y avoir droit une fois le regroupement familial accompli[11].

Enfin, une règlementation des conditions d’admission spécifique pour les enseignants de matières religieuses ou culturelle fait son apparition dans la loi[12].

Artias – Paola Stanic, juriste

 

Voir également nos dossiers Veille : juillet 2017, janvier 2017, mai 2016

Pour plus d’informations, consultez notre rubrique Migrations >> Libre circulation des personnes

[1] Voir les différents dossiers que l’Artias avait rédigé lors du vote au parlement d’une part, et lors de la mise en consultation des ordonnances d’autre part, ainsi qu’un dossier complet sur la question de l’aide sociale et de la fin du droit au séjour.

[2] Modification de l’Ordonnance sur le service de l’emploi (OSE).

[3] Modification de l’Ordonnance sur l’intégration des étrangers (OIE).

[4] Modification de l’Ordonnance sur le commerce itinérant.

[5] Modification de l’art. 14, al.3 de la Loi fédérale sur l’assurance-chômage (LACI) et de l’Ordonnance sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (OACI).

[6] Modification de l’Ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA).

[7] Cet aspect fait l’objet de la nouvelle ordonnance sur l’intégration des étrangers (OIE).

[8] Art. 58a LEI.

[9] Art. 34 al.4 et 5 LEI, 42, al.3 LEI.

[10] Art. 43 al.4 et 5, art. 44 al.4 LEI.

[11] Art. 43 al.1, let.c et e, art. 44. al.1 let c et e LEI.

[12] Art. 26a LEI.