L’encouragement linguistique précoce relève du droit à un enseignement de base. Il doit être gratuit et accessible.

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Le Tribunal fédéral s’est penché récemment[1] sur un recours concernant l’article 41c de la Loi sur l’instruction publique[2] du canton de Thurgovie.

En 2022, le législateur de ce canton a adopté une modification de loi qui prévoit un encouragement linguistique précoce à partir de l’âge de trois ans. Destinée aux enfants qui en présentent le besoin, cette prestation est obligatoire. Les parents sont tenus de participer à la procédure d’établissement du besoin d’encouragement linguistique, d’accompagner l’enfant au lieu où la prestation est dispensée et de payer une contribution en fonction du revenu. Les parents dans le besoin sont exemptés du paiement. S’ils ne coopèrent pas, la loi prévoit une procédure d’amende.

Trois personnes forment un recours en matière de droit public contre les nouvelles dispositions. Elles demandent l’abrogation de l’article 41c al. 2 et 3 de la loi, en faisant notamment valoir que les dispositions cantonales contreviennent au droit fondamental à un enseignement de base gratuit (inscrit à l’art. 19 de la Constitution fédérale).

Contrairement aux arguments du Canton, qui qualifiait l’obligation inscrite dans la loi de « sélective », le Tribunal fédéral estime que toute une tranche d’âge se retrouve soumise à l’appréciation de leurs capacités linguistiques en vue de l’orientation vers l’encouragement linguistique précoce. Il s’agit donc bien d’une obligation scolaire imposée à toute une cohorte. Or, la gratuité représente la contrepartie au « droit-obligation » que forme l’instruction publique obligatoire.

Le Tribunal fédéral ajoute que le fait de promouvoir l’égalité des chances avant l’entrée à l’école obligatoire permet de faire l’économie de mesures d’encouragement linguistique pendant la scolarité. Il rappelle que l’article 19 Cst. a également pour objectif la garantie de l’égalité des chances – et qu’il interdit de prélever des frais pour les mesures d’encouragement linguistique dispensées au cours de la scolarité. Ce principe est également valable lorsque l’encouragement linguistique a lieu avant l’entrée à l’école obligatoire.

De même, les transports doivent être pris en charge lorsque le chemin de l’école est trop long ou représente un danger pour l’enfant. Le Canton doit garantir la proximité et l’accessibilité de ces prestations obligatoires dans les arrondissements scolaires. L’article 41c al. 2, qui impartit la responsabilité du trajet aux seuls parents n’est pas non plus conforme à l’art. 19 Cst.

Le recours est admis.

Arrêt 2C_402/2022 du 31 juillet 2023, suggéré pour publication.


[1] Arrêt 2C_402/2022 du 31 juillet 2023, suggéré pour publication.

[2] Gesetz des Kantons Thurgau vom 29. August 2007 über die Volksschule (VG/TG, RB 411.11).