Le 28 juin 2017, le Conseil fédéral a ouvert la consultation sur la modification d’ordonnances concernant la mise en œuvre de l’initiative « contre l’immigration de masse ». Pour rappel, le 16 décembre 2016, le Parlement a adopté la mise œuvre de cette initiative en prévoyant notamment une obligation pour les employeurs d’annoncer les postes vacants au service de l’emploi dans des groupes de profession, domaines d’activités ou régions économiques qui enregistrent un taux de chômage supérieur à la moyenne. A cette occasion, d’autres dispositions en matière d’étrangers ont également été adoptées (voir Artias, dossier de veille, libre circulation et étrangers, nouvelles dispositions adoptées par le Parlement le 16 décembre 2016). Certaines de ces modifications nécessitent une concrétisation au niveau des ordonnances.
Obligation de communiquer les postes vacants
Le projet d’ordonnance prévoit d’introduire l’obligation de communiquer les postes vacants dans les genres de professions dont les taux de chômage à l’échelle nationale atteignent ou dépassent les 5% (selon estimation, cela correspond à une obligation d’annonce pour 31% du total des postes). L’accès aux informations relatives aux postes annoncés est limité durant 5 jours ouvrables aux collaborateurs du service public de l’emploi (SPE) et aux demandeurs d’emploi inscrits auprès du SPE. Le SPE dispose de 3 jours ouvrables pour transmettre aux employeurs les informations relatives aux demandeurs d’emploi dont les dossiers sont pertinents ou pour leur communiquer qu’aucun candidat potentiel n’est disponible. Les employeurs peuvent déterminer de leur propre chef les raisons qui font de personnes des candidats appropriés. Ils sont toutefois tenus d’inviter ces derniers à un entretien d’embauche ou à un examen d’aptitude. Certaines exceptions à l’obligation d’annonce sont prévues (ex. : postes vacants pourvus par des personnes déjà employées par le même employeur, anciens apprentis maintenus en emploi, engagement de courte durée, etc.)
Les cantons ont la possibilité de faire une demande d’introduction de l’obligation de communiquer les postes vacants sur leur territoire lorsque certains genres ou groupes de professions enregistrent un taux de chômage supérieur à la valeur seuil nationale.
Annonce au service de l’emploi par les autorités d’aide sociale des admis provisoires et réfugiés reconnus
La loi adoptée le 16 décembre 2016, prévoit que les autorités cantonales d’aide sociale devront annoncer au Service public de l’emploi les réfugiés reconnus et personnes admises à titre provisoire qui sont sans emploi (art. 53, al. 6, nLEtr).
Le projet d’ordonnance en consultation prévoit:
nArt. 10a OIE
1 Les cantons réglementent la procédure selon laquelle les réfugiés reconnus et personnes admises à titre provisoire en quête d’emploi sont annoncés au service public de l’emploi.
2 L’obligation d’annonce s’applique aux personnes dont l’employabilité a été établie à la suite d’une évaluation.
3 Les cantons rendent compte chaque année au SEM de leurs annonces. Leur compte rendu porte sur:
a. les compétences concernant l’évaluation de l’employabilité et la gestion des cas;
b. les modalités de l’évaluation de l’employabilité;
c. le nombre d’annonces, le profil des personnes annoncées et le nombre de placements;
d. les mesures prises en faveur de l’intégration des réfugiés reconnus et personnes admises à titre provisoire et leur financement.
Il ne suffit donc pas que les réfugiés reconnus et admis provisoires soient sans emploi pour qu’il y ait obligation de les annoncer. Selon le rapport explicatif du Conseil fédéral, l’évaluation de l’employabilité doit être précédée d’un relevé de compétences. Les personnes à annoncer sont tenues de posséder les compétences et ressources nécessaires à l’exercice d’une activité lucrative (connaissances linguistiques suffisantes, par ex.). L’évaluation de l’employabilité inclut également une estimation des perspectives individuelles sur le marché du travail.
La réglementation de la procédure jusqu’à l’annonce des personnes concernées relève des cantons. Les cantons peuvent charger un autre service que les autorités cantonales d’aide sociale d’effectuer l’annonce. Le document de travail élaboré dans le cadre de la CII sur la collaboration entre l’aide sociale et assurance-chômage qui définit l’employabilité servira de base à l’élaboration de recommandations et d’outils pratiques (Collaboration entre l’assurance-chômage et l’aide sociale, Rapports des groupes de travail, Employabilité, Modèle de financement et Convention-Cadre, 23 janvier 2017).
Le rapport explicatif du Conseil fédéral se réfère à la Déclaration sur les principes d’une intégration durable dans le marché du travail et dans la société des adolescents et jeunes adultes arrivés tardivement en Suisse de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP) du 23 juin 2016 et indique que « L’intégration professionnelle des réfugiés reconnus et des personnes admises à titre provisoire est régie par le principe de la primauté de la formation sur le travail. Ce principe tient notamment compte du fait que les personnes relevant du domaine de l’asile sont en moyenne plus jeunes que la population suisse. »« Pour réussir leur intégration professionnelle, les réfugiés reconnus et les personnes admises à titre provisoire doivent, dans un premier temps, devenir employables. » « Si un réfugié reconnu ou une personne admise à titre provisoire a le potentiel pour entamer une formation professionnelle initiale ou pour suivre une formation complémentaire, le principe de la primauté de la formation sur le travail veut que cette personne ne soit pas annoncée comme demandeur d’emploi. »
Durcissement de l’assurance-chômage pour les Suisses de retour de l’étranger
Dans le cadre des modifications de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2016, la loi sur l’assurance-chômage a été durcie par le parlement s’agissant de la libération des cotisations de l’assurance-chômage pour les Suisses de retour de l’étranger (nArt. 14 al. 3 LACI). La loi adoptée prévoit que pour être libéré des cotisations à l’assurance-chômage, les Suisses de l’étranger devront dorénavant non seulement justifier de l’exercice d’une activité salariée à l’étranger, mais également « de l’exercice en Suisse d’une activité soumise à cotisation pendant six mois au minimum ». Pour le Conseil fédéral, le texte législatif ne stipule pas clairement si la condition est remplie en cas d’exercice d’une activité en Suisse pendant au moins six mois avant le départ à l’étranger, ou si cette activité doit avoir été exercée après le retour en Suisse.
Le Conseil fédéral, qui doit déterminer selon la loi à quelles conditions les étrangers ressortissants d’états tiers dont l’autorisation d’établissement n’est pas échue sont également libérés des conditions relatives à la période de cotisation après un séjour à l’étranger de plus d’un an, a établi dans son projet d’ordonnance que l’activité en Suisse soumise à cotisation pendant six mois au minimum doit avoir été effectuée durant le délai-cadre.
Les autres dispositions d’ordonnances en consultation concernent notamment la communication des données aux autorités migratoires cantonales en cas de versement de prestations complémentaires.
La consultation dure jusqu’au 6 septembre 2017.
Artias – Yvan Fauchère
Pour plus d’informations, voir la rubrique Migrations >> Libre circulation des personnes