Le chômage des personnes de 60 ans et plus fait l’objet d’une assurance spécifique.
Lors de la session d’été 2020, le Parlement a adopté des prestations transitoires pour empêcher que les personnes qui arrivent en fin de droits de l’assurance-chômage à 60 ans ou plus soient contraintes de recourir à l’aide sociale – ou d’épuiser leurs économies – avant la retraite.
La loi sur les prestations transitoires pour les chômeurs âgés (LPTra[1]) finalement adoptée est calquée sur la Loi sur les prestations complémentaires[2] et se révèle plus modeste que la proposition élaborée par le Conseil fédéral et adoptée par les partenaires sociaux, lorsqu’ils ont convenu d’une série de mesures pour accompagner la libre circulation des personnes, en particulier pour les travailleurs indigènes « âgés » (dès 40 ans)[3].
Conditions d’octroi
Les conditions suivantes sont requises pour pouvoir bénéficier de prestations transitoires:
- Arriver en fin de droits de l’assurance-chômage à 60 ans ou plus tard.
- Avoir été assuré-e à l’AVS pendant au moins 20 ans, dont au moins cinq ans après 50 ans et avoir réalisé un revenu annuel d’au moins 75% du montant maximal de la rente de vieillesse[4] ou faire valoir des bonifications pour tâches d’assistance ou pour tâches éducatives. La prise en compte des bonifications pour tâches d’assistance ou pour tâches éducatives représente une nouveauté par rapport au projet du Conseil fédéral, qui n’en tenait pas compte dans la comptabilisation des années travaillées.
- La fortune nette doit être inférieure à la moitié des seuils fixés dans la Loi sur les prestations complémentaires (à son article 9a nLPC), c’est-à-dire : 50’000 francs pour les personnes seules et 100’000 francs pour les couples ; chaque enfant encore à charge donnant droit à une élévation du seuil de 25’000 francs. Dans ce calcul, d’après l’art. 9a al.2 nLPC, l’immeuble qui sert d’habitation au bénéficiaire et dont il ou elle est propriétaire, ne fait pas partie de la fortune nette, au contraire de certaines sommes dédiées à la prévoyance (art. 5 al.2 LPTra).
Les prestations transitoires ne sont pas versées aux assuré-es auprès de l’assurance-invalidité ni auprès des personnes qui perçoivent une rente de vieillesse de manière anticipée (art. 5 al.3 LPTra). De même, elles sont subsidiaires par rapport aux prestations complémentaires fédérales (art. 6 LPTra).
À noter que les prestations transitoires seront versées jusqu’à l’âge ordinaire de la retraite ou jusqu’au moment de la retraite anticipée s’il est prévisible que le ou la futur-e retraitée aura droit à des prestations complémentaires à l’âge ordinaire de la retraite (art.3 al.1 LPTra).
Calcul
Comme les prestations complémentaires fédérales, les prestations transitoires sont composées d’un minimum vital et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité.
Le minimum vital est obtenu par soustraction des dépenses reconnues aux revenus déterminants, toujours sur le modèle de la Loi sur les prestations complémentaires révisée.
Le montant destiné à la couverture des besoins vitaux (c’est-à-dire le minimum vital) est le même que celui des prestations complémentaires : contrairement au projet du Conseil fédéral, qui avait majoré ce montant de 25% pour tenir compte d’éventuels frais médicaux ou d’invalidité, le Parlement a suivi le Conseil des Etats en l’alignant sur la nouvelle Loi sur les prestations complémentaires. Par contre, la proposition de tenir compte des frais médicaux, faite le 4 mars 2020 par le Conseil national, a également été suivie, ce qui rééquilibre la loi.
Le remboursement de frais de maladie et d’invalidité (art. 17 LPTra) reprend une partie des frais remboursés par les prestations complémentaires (art. 14 LPC). De plus, les frais de maladie et d’invalidité sont plafonnés à 5’000 francs par année pour les personnes seules et 10’000 francs pour les couples et les familles (art. 17 al.2 LPTra), ce qui n’est pas le cas en matière de prestations complémentaires.
Enfin, le montant de la prestation transitoire est plafonné à hauteur de 2,25 fois le montant destiné à la couverture des besoins vitaux. Pour l’année 2020, cela équivaut à un maximum de 43’762,50 francs pour les personnes seules et 65’643,75 francs pour les couples. C’est moins que ce que prévoyait le Conseil fédéral[5], mais plus que la proposition adoptée par le Conseil des Etats lors de la session d’hiver 2019[6].
Renonciation à des revenus ou parts de fortune
De manière analogue à la législation sur les prestations complémentaires, il est tenu compte d’un revenu ou d’une fortune hypothétique en cas de renoncement sans obligation légale et sans contre-prestation adéquate. Si le conjoint ou la conjointe de l’ayant droit renonce volontairement à exercer une activité lucrative raisonnablement exigible, un revenu hypothétique est également pris en compte (art.13 al.1 LPTra). Enfin, il est tenu compte d’un dessaisissement de fortune en cas de dépense jugée trop importante, de la même manière que le prévoit la révision de la Loi sur les prestations complémentaires.
Versement dans un pays membre de l’UE/AELE
À noter que, contrairement aux prestations complémentaires à l’AVS/AI, les prestations transitoires peuvent être versées dans un pays membre de l’UE/AELE. Dans ces situations, la loi prévoit que les dépenses reconnues et les revenus déterminants soient adaptés en fonction du pouvoir d’achat du pays de résidence (art. 8 LPTra).
Naissance et fin du droit, exécution forcée et compensation
Le droit aux prestations transitoires prend naissance le premier jour du mois au cours duquel la demande est déposée et cesse à la fin du mois au cours duquel l’une des conditions d’octroi cesse d’être remplie. Le droit aux prestations transitoires prend également fin dès que l’assuré-e a droit au versement d’une rente anticipée de vieillesse, en cas de perception prévisibles de prestations complémentaires.
Enfin, les prestations transitoires, qui ont pour vocation de garantir le minimum vital, ne peuvent être saisies. Les créances en restitution peuvent être compensées avec : les prestations transitoires échues, les prestations échues d’autres assurances sociales (pour autant que ces lois autorisent la compensation) et les prestations échues relevant de la prévoyance professionnelles. Avant de procéder à la compensation, la caisse doit d’office examiner la remise de l’obligation de restituer, c’est-à-dire examiner si la personne était de bonne foi et se trouve dans une situation difficile. En règle générale, le minimum vital du droit des poursuites ne saurait être entamé[7].
Artias – Paola Stanic, juriste
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[1] Nous nous référons au texte présenté au vote final du Parlement lors de la session d’été 2020.
[2] Dans la version révisée qui entrera en vigueur le 1er janvier 2021, https://www.admin.ch/opc/fr/official-compilation/2020/585.pdf, voir ce document de veille ARTIAS.
[3] https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-75052.html
[4] 21’330 francs par année en 2020.
[5] Le projet du Conseil fédéral prévoyait un plafond de 3x le montant destiné à la couverture des besoins vitaux dans les PC. 58’350 francs par an pour une personne seule ou 87’525 francs par an pour un couple.
[6] Lors de cette session, le Conseil des Etats avait baissé le montant de la prestation transitoire à 38’900 francs par an pour une personne seule et 58’350 par an pour un couple. Voir la veille législative de l’ARTIAS.
[7] Les Directives concernant les prestations complémentaires prévoient qu’une compensation est en outre exclue lorsque la différence entre le revenu brut et le minimum vital est inférieur au montant de la PC annuelle (ch.4640.02 DPC).