Lors de sa séance du 23 octobre 2024, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la modification de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants[1]. Ce projet fait suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après : CourEDH), de 2022, dans lequel la Suisse a été condamnée pour discrimination à l’égard des veufs[2]. Il répond également au postulat 20.4449 « Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves ».
Actuellement, seules les veuves peuvent bénéficier d’une rente de survivant à vie. Les veufs n’y ont droit que jusqu’à ce que leur plus jeune enfant atteigne la majorité[3]. La CourEDH ayant condamné cette disparité, un régime transitoire a été mis en place par l’OFAS afin de permettre aux veufs ayant des enfants de bénéficier d’une rente de survivant à vie[4].
Le projet supprime les rentes de veuves à vie et augmente la durée des rentes de veufs. Par conséquent, les rentes de veuves sont alignées sur les rentes de veufs et la période de formation des enfant(s) est prise en compte, en principe jusqu’aux 25 ans du plus jeune enfant. Selon le Conseil fédéral, le projet permettra ainsi d’éliminer les différences de traitement, présentes dans la loi, entre les hommes et les femmes en matière de rentes de survivants de l’assurance vieillesse et survivants. En outre, ce projet permettrait, s’il entre en vigueur en 2026, une diminution des dépenses de l’AVS d’environ 350 millions de francs, dont 70 millions d’économie pour la Confédération.
Le projet de révision proposé par le Conseil fédéral prévoit les modifications suivantes :
- Pour les personnes qui deviennent veuves ou veufs après l’entrée en vigueur de la réforme :
- Le droit à une rente de survivant sera accordé aux parents survivants – hommes ou femmes – jusqu’aux 25 ans de l’enfant, peu importe leur état civil. En cas de prise en charge d’un enfant en situation de handicap donnant droit aux bonifications pour tâches d’assistance de l’AVS, ce droit sera prolongé au-delà de 25 ans, mais au plus tard jusqu’à ce que le bénéficiaire atteigne l’âge de référence fixé à 65 ans (âge de la retraite) ;
- Le droit à une rente de veuvage transitoire de 2 ans pour les personnes n’ayant plus d’enfants à charge. Cela concernera les veuves ou veufs mariés et divorcées qui percevaient une contribution d’entretien de leur ex-conjoint-e ;
- Le droit à des prestations complémentaires à l’AVS/AI si les veuves ou les veufs au bénéficie d’une rente de veuvage transitoire étaient âgés d’au moins 58 ans au moment du décès de leur conjoint-e ou ex-conjoint-e et que ce décès a mené à la précarité ;
- Dans l’assurance-accidents, le droit à une rente de survivant sera accordé aux veuves et veufs lorsqu’au décès de leur conjoint-e ou ex-conjoint-e (qui verse une contribution d’entretien), ils ou elles ont des enfants qui n’ont plus droit à une rente ou ont atteint l’âge de 45 ans. Dans l’assurance-accidents, les veuves ou et les veufs bénéficient du droit à la rente de survivant à vie (sauf en cas de remariage, de décès de l’ayant droit ou en cas de rachat de rente)[5].
- Pour les personnes qui perçoivent déjà une rente de veuve ou de veuf avant la réforme :
- Le droit aux rentes de veuves et de veufs âgés de 55 ans et plus au moment de l’entrée en vigueur de la révision reste soumis à l’ancien droit. Pour les veufs, cela signifie qu’ils pourront bénéficier d’une rente de survivant à vie, conformément au régime transitoire instauré par l’OFAS à la suite de l’arrêt de la CourEDH ;
- La suppression, 2 ans après l’entrée en vigueur de la modification, des rentes de veuves et de veufs âgés de moins de 55 ans au moment de l’entrée en vigueur de la réforme, à moins qu’ils ou elles aient encore un enfant âgé de moins de 25 ans[6] ;
- Le droit aux rentes de veuves et de veufs pour les bénéficiaires de prestations complémentaires à l’AVS/AI âgés de 50 ans et plus au moment de l’entrée en vigueur de la révision reste soumis à l’ancien droit. Pour les veufs, cela signifie qu’ils pourront bénéficier d’une rente de survivant à vie, conformément au régime transitoire instauré par l’OFAS à la suite de l’arrêt de la CourEDH.
Il appartient dorénavant au Parlement d’évaluer cette proposition.
Pour d’autres éclairages, voir notre rubrique Social >> Assurances sociales >> Assurance vieillesse et survivants (LAVS)
[1] Communiqué de presse disponible à l’adresse suivante : https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-102876.html. Voir également nos précédentes actualités de l’Artias en la matière : Révision des rentes de veuves et de veufs : ouverture de la consultation, publiée en décembre 2023 ; Projet de révision de la rente de veuve et de veuf du Conseil fédéral, publiée en juillet 2023.
[2] L’Artias a consacré une analyse d’arrêt relative à cette question.
[4] Bulletin de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) n° 460 du 21 octobre 2022.
[5] Art. 29 al. 6 LAA.
[6] Cf. Point 1.1.