Madame A. a perçu des prestations de l’aide sociale, notamment en 2016 et 2017.
Elle travaillait en tant qu’aide de cuisine et avait signé une cession de salaire au bénéfice du service social. De février à septembre, Madame A. avait été en plus engagée pour des travaux de nettoyage qu’elle n’avait pas déclaré au service social. Elle a perçu un complément de revenu trop important pour la période d’août à décembre 2016 et de mars à novembre 2017.
Le tribunal d’arrondissement a acquitté Madame A. des chefs d’accusation d’obtention illicite de prestations de l’aide sociale (selon l’article 148a du Code pénal) ainsi que d’obtention illicite de prestations (selon les dispositions de la loi cantonale d’aide sociale). Ce jugement a été partiellement cassé par le Tribunal cantonal argovien : Madame A. a été condamnée à une peine pécuniaire avec sursis, à une amende ainsi qu’à une expulsion pénale du territoire suisse pendant cinq ans. Madame A. recourt auprès du Tribunal fédéral et demande son acquittement, respectivement sa condamnation à une amende en raison du peu de gravité du délit ainsi que la renonciation à l’expulsion. L’indu se chiffre, selon le tribunal cantonal, à 3’303.73 francs.
Dans le cas d’espèce, le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de la hauteur de la somme constituant un cas de peu de gravité, étant donné que dans la situation de Madame A., l’indu est proche de cette somme et représente en tous cas une infraction de moindre importance[1]. Le fait que Madame A. ait déjà caché un revenu à l’autorité d’aide sociale parle en sa défaveur, toutefois, aucune condamnation n’avait été prononcée. La Haute cour constate également que la recourante, qui a commis le délit par omission, n’a pas fait montre de beaucoup d’énergie criminelle. Elle pouvait par ailleurs s’attendre en tout temps que cette dernière soit découverte, l’activité lucrative ayant été déclarée auprès de l’assurance-chômage. L’autorité d’aide sociale endosse également une certaine responsabilité : elle aurait dû examiner la raison des fluctuations des versements de l’assurance-chômage. Cette responsabilité partagée amoindrit celle de la recourante. Enfin, le Tribunal fédéral constate que Madame A. vit à la limite du seuil de pauvreté et a utilisé l’argent pour un bien de première nécessité, et non pour des dépenses somptuaires. Le trop-perçu avait été utilisé pour acquérir un lit pour son fils, souffrant d’un important mal de dos.
Le Tribunal qualifie l’infraction de cas de peu de gravité et renvoie l’affaire à l’instance inférieure pour nouveau jugement. Le recours est partiellement admis. Auteure d’une contravention, la question de l’expulsion pénale de Madame A. ne se pose plus.
Arrêt 6B_1246/2020 ( all. / non publié)
Artias – Paola Stanić
[1] La Conférence des procureurs de Suisse a estimé la limite des cas de peu de gravité à 3’000 francs.