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Les PC familles ne sont pas de l’aide sociale au sens de la loi sur les étrangers

Le Tribunal fédéral a rendu un arrêt (2C_750/2014 du 27 octobre 2015) jugeant que les PC familles (prestations complémentaires) selon le modèle tessinois ne sont pas considérées comme de l’aide sociale au sens de l’art 62 let. e de la Loi fédérale sur les étrangers (LEtr)

Pour rappel:

  • L’art. 62 let. e LEtr prévoit que l’autorité compétente peut révoquer une autorisation lorsque l’étranger ou une personne dont il a la charge dépend de l’aide sociale.
  • L’art. 63 al. 1 let. c LEtr prévoit que l’autorisation d’établissement peut être révoquée si l’étranger dépend durablement et dans une large mesure de l’aide sociale.
  • L’art. 63 al. 2 LEtr prévoit que l’autorisation d’un étranger qui séjourne en Suisse légalement et sans interruption depuis plus de 15 ans ne peut être révoquée si la personne dépend durablement et dans une large mesure de l’aide sociale.

Au Tessin, l’« assegno di prima infanzia » (API) assure la subsistance de l’ensemble de la famille avec des enfants de moins de trois ans; l’« assegno familiare integrativo »(AFI ) couvre le coût de l’entretien de l’enfant, mais pas celui des parents, jusqu’à la fin de la quinzième année de l’enfant. Il s’agit communément de Prestations complémentaires pour les familles.

Le service de la population a averti les membres d’un couple que s’ils continuaient à bénéficier de ces prestations, leurs autorisations de séjour pourraient leur être retirées. La question à résoudre pour le Tribunal fédéral était dès lors de savoir si ces prestations devaient être considérées ou non comme de l’aide sociale.

Le Tribunal fédéral a indiqué que ces prestations répondent clairement à un objectif de politique familiale. A la différence de l’aide sociale, elles ne couvrent pas le risque de pauvreté en tant que tel; elles couvrent plutôt le fait que le choix d’avoir un ou des enfants risque de causer ou aggraver la pauvreté et génère des coûts supplémentaires. La Loi fédérale sur les allocations familiales n’empêche pas les cantons de prévoir d’autres prestations familiales (art. 3 al. 2 LAF). L’AFI et l’API sont dès lors des prestations familiales qui ne sont pas de l’aide sociale au sens de l’art. 62 let. e LEtr.

Le Tribunal fédéral précise que cela ne change pas sa jurisprudence concernant la disposition sur l’Accord sur la libre circulation des personnes qui prévoit qu’une personne ressortissante de l’UE/AELE qui n’exerce pas d’activité économique doit bénéficier des moyens financiers suffisants pour obtenir un permis de séjour. Dans ce cadre de l’ALCP, le fait de devoir faire appel aux AFI et API pourra être pris en compte. Les notions d’aide sociale dans la loi sur les étrangers et à l’art. 24 al. 1 et 2 de l’annexe I de l’ALCP sont différentes.

Libre circulation: pas de droit à l’aide sociale pour permis « L » non travailleur

Le Tribunal fédéral a rendu un arrêt le 22 octobre 2015 (8C_897/2014) concernant une personne de l’UE domiciliée en Valais ayant un permis L, mais ne travaillant pas.

Les faits

A. est arrivé en Suisse en 2007. Il a bénéficié successivement de plusieurs permis L UE/AELE. A. est sous curatelle de portée générale. Il a travaillé un jour dans le cadre d’un contrat de mission temporaire en 2013 ou en 2014. Il a effectué une nouvelle mission entre le 13 juin et le 4 juillet 2014. Le 24 mars 2014, A. a déposé une demande d’aide sociale auprès de sa commune. La commune a tout d’abord refusé de lui accorder l’aide sociale du fait qu’il était titulaire d’un permis L et sans emploi. Elle s’est ensuite ravisée et lui a accordé une aide d’urgence pour une durée de trois mois.

Sur recours, le Tribunal cantonal a renvoyé la cause à la commune concernant l’aide d’urgence et il a confirmé la décision de refus de l’aide sociale ordinaire. Le recours de A. au Tribunal fédéral porte sur le refus de l’aide sociale ordinaire.

Le règlement d’exécution de la loi sur l’intégration et l’aide sociale du canton du Valais (RELIAS) prévoit s’agissant des « personnes détentrices d’un permis L ».

Art. 12 RELIAS

1 Les détenteurs d’un permis L et les personnes dont ils ont la charge et faisant ménage commun ont droit à une aide sociale ordinaire s’ils remplissent certaines conditions spécifiques.

2 Ils doivent avoir un emploi dans le premier marché du travail. L’aide sociale complète le revenu durant la période de validité du permis. Avant la prise d’un emploi ou après la fin des rapports de travail, il n’y a pas de droit à une aide sociale. Les exceptions à ce principe sont soumises à autorisation du service de l’action sociale.

Pas de droit à l’aide sociale selon l’ALCP

Le Tribunal fédéral indique que l’ALCP n’ouvre « pas de droit à l’aide sociale pour les titulaires d’un permis L ». Il faut réserver le fait qu’un travailleur de l’UE/AELE a droit à l’aide sociale (même s’il est titulaire d’un permis L) et qu’un chômeur en situation de chômage involontaire peut conserver son ancienne qualité de travailleur et ainsi son droit à l’aide sociale. En l’espèce, le Tribunal fédéral note que A. n’exerce pas et n’a pas exercé d’activité lucrative durable. Il n’avait aucune perspective réelle d’engagement et il ne se trouvait donc pas en situation de chômage involontaire. Il pouvait donc conformément à l’ALCP et à l’art 12 RELIAS être exclu de l’aide sociale. Le fait qu’A. ait son domicile en Suisse n’y change rien.

Disposition dans le règlement d’exécution jugée suffisante

Le recourant a invoqué qu’un traitement différent entre des groupes de personnes pour l’octroi de l’aide sociale nécessite une base légale formelle. Le Tribunal fédéral indique que l’art. 12 RELIAS ne va pas à l’encontre de l’art. 12 Cst, puisqu’il ne restreint pas l’aide d’urgence, mais l’aide sociale ordinaire.

Le Tribunal fédéral relève qu’en matière d’aide sociale, « l’exigence de précision de la règle se heurte généralement à des difficultés particulières en raison de la diversité des situations et des montants d’aide qui doivent être accordés en fonction des spécificités et de la situation sociale et économique des bénéficiaires ». La densité normative dans le domaine de l’aide sociale n’est pas soumise à des exigences élevées.

L’art. 6 let. h de la loi sur l’intégration et l’aide sociale du canton du Valais (LIAS) charge le Conseil d’Etat d’arrêter, par règlement d’exécution, les normes applicables en matière d’aide sociale.

Le Tribunal fédéral indique que « l’art. 12 RELIAS, est une transposition dans le droit cantonal de l’art. 6 par. 2 Annexe I ALCP, visant à éviter que des personnes concernées ne deviennent une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale de l’Etat membre d’accueil et il est l’expression d’une conception très largement répandue au plan international. Il en est de même au plan interne suisse. » … « Dans la mesure où elle peut s’appuyer directement sur une norme de l’ALCP et qu’elle n’est finalement que la simple transposition d’objectifs qui résultent directement de l’ALCP et de principes communément admis, il y a lieu de considérer que la disposition réglementaire litigieuse ne requiert pas de base légale formelle plus précise que l’art. 6 let. h LIAS précité. »

Il subsiste toutefois une incertitude quant à savoir si les cantons dont la législation n’a pas intégré de règles spéciales concernant les demandeurs d’emploi titulaires d’une autorisation de courte durée doivent ou non appliquer les règles ordinaires en matière d’aide sociale.

 

 

AI: élargissement de la jurisprudence du TF, l’OFAS va-t-il trop vite?

Comme indiqué dans une précédente actualité, le Tribunal fédéral a modifié sa jurisprudence en matière d’évaluation du droit à une rente AI en cas de troubles somatoformes douloureux et d’affections psychosomatiques (arrêt 9C_492/2014 du 3 juin 2015, avec extraits traduits en français).  Le Tribunal fédéral a abandonné la présomption selon laquelle de tels troubles peuvent être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible et a notamment mis l’accent sur les ressources de la personne qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser ainsi la capacité d’exécuter une tâche ou une action.

Suite à cette jurisprudence, l’OFAS a élaboré un catalogue de questions en relation avec l’établissement des expertises médicales.

Le 9 septembre 2015, l’AI a publié ce catalogue constituant un mandat contraignant pour les offices AI (Lettre circulaire AI n. 339 / mandat concernant les expertises médicales). Ce catalogue ne s’applique toutefois pas qu’aux trouble psychosomatiques, mais à toutes les atteintes à la santé. Dans sa lettre circulaire, l’OFAS indique :

« Ce mandat s’applique indistinctement à toutes les atteintes à la santé. En effet, dans l’optique d’une instruction ciblant les ressources et les capacités de la personne assurée, une différenciation entre troubles psychosomatiques et autres atteintes ne se justifie plus. »

L’OFAS a vu dans cet arrêt du Tribunal fédéral « une chance pour l’AI ». Dans le dernier numéro de Sécurité Sociale (Sécurité Sociale CHSS 5/2015), le chef du secteur Procédures et rentes du domaine AI à l’OFAS a commenté l’élargissement du champ d’application de cet arrêt par l’OFAS:

« Dans l’optique de la réadaptation, l’AI se penche déjà – à tout le moins depuis la 5e révision – davantage sur les ressources dont dispose encore l’assuré que sur ses déficits. Ce n’est qu’en sachant avec précision ce dont l’assuré est encore capable qu’elle peut l’aider à se réinsérer sur le marché du travail. Par conséquent, l’assurance estime que la procédure d’établissement des faits désormais prévue par le Tribunal fédéral doit s’appliquer non seulement aux troubles psychosomatiques, mais à toutes les atteintes à la santé. »(…)

« L’AI voit dans l’arrêt du Tribunal fédéral l’occasion d’axer ses examens encore plus fortement et plus systématiquement sur les ressources et de poursuivre le principe de la primauté de la réadaptation sur la rente de manière encore plus ciblée. »

Il s’agit ainsi d’un changement important effectué rapidement et qui pose certaines questions. Par exemple, dans son arrêt du 3 juin 2015 concernant les troubles somatoformes, le Tribunal fédéral a « maintenu, voire renforcé » (8C_562/2014 du 29 septembre 2015), la portée des motifs d’exclusion (discordance manifeste entre les douleurs décrites et le comportement observé ou l’anamnèse, allégation d’intenses douleurs dont les caractéristiques restent cependant vagues, absence de demande de soins ou de traitement, plaintes très démonstratives qui laissent insensible l’expert, allégation de lourds handicaps dans la vie quotidienne malgré un environnement psychosocial largement intact) dans ce domaine. L’élargissement du champ d’application de cet arrêt pose ainsi la question de savoir dans quelle mesure ces critères d’exclusion vont s’appliquer dans tous les cas.

Retour des Suisses de l’étranger: suppression de l’indemnisation par la Confédération

La nouvelle loi fédérale sur les Suisses de l’étranger (LSEtr) entrera en vigueur le 1er novembre 2015. De manière générale, cette nouvelle loi, qui fait suite à une initiative parlementaire, rassemble les dispositions les plus importantes pour les Suisses de l’étranger : aide sociale, droits politiques, protection consulaire.

S’agissant de l’aide sociale versée aux Suisses à l’étranger, cette loi reprend dans la plupart des cas les dispositions qui se trouvent actuellement dans la loi fédérale sur l’aide sociale et les prêts alloués aux ressortissants à l’étranger (LAPE).

Toutefois, l’aide sociale versée par les cantons au cours des trois premiers mois qui suivent le retour d’un Suisse de l’étranger ne donnera plus lieu à une indemnisation des cantons par la Confédération comme c’était le cas jusqu’ici. La raison invoquée est que l’aide sociale fournie aux ressortissants suisses domiciliés en Suisse est l’affaire des cantons (art. 115 Cst.).

Ce transfert de charges sur les cantons est de l’ordre de grandeur de 2 millions par année pour l’ensemble de la Suisse (en 2012 : 2’023’510 fr. pour 504 dossiers et 756 personnes). Les cantons de Vaud (217’000 fr. en 2012) et Genève (216’000 fr. en 2012) sont les plus touchés en Suisse romande.

A noter en pratique que l’ordonnance d’application du 7 octobre 2015 précise qu’en cas de retour en Suisse, les frais de voyage éventuellement pris en charge par la Confédération pour le retour en Suisse englobent « au besoin, l’aide nécessaire à partir de l’arrivée en Suisse et jusqu’à la première prise de contact avec le service social » (art. 28 let.c OSETr).

Aide sociale: concubinage et enfants d’une précédente relation – arrêt du TF

Le Tribunal fédéral a rendu un arrêt destiné à publication (8C_232/2015 du 17 septembre 2015) concernant l’aide sociale et la prise en compte des revenus du concubin, dans le cas où des enfants d’une précédente relation du bénéficiaire vivent dans le ménage.

Le Tribunal fédéral avait déjà jugé précédemment qu’en cas de concubinage stable, il n’est pas arbitraire de tenir compte de cette circonstance dans l’évaluation des besoins d’assistance du bénéficiaire, quand bien même il n’existe pas un devoir légal et réciproque d’entretien entre les partenaires (ATF 136 I 129).

Dans le cas d’espèce, A. vit depuis plus de sept ans à Zurich avec B. et, en partie, avec six enfants : trois enfants d’une union précédente de A., deux enfants d’une union précédente de B. et un enfant commun. A. est bénéficiaire de l’aide sociale, à l’inverse de B. L’ordonnance d’application de la loi zurichoise sur l’aide sociale renvoie aux normes CSIAS.

Le Tribunal fédéral indique que l’aide sociale est régie par le principe de subsidiarité. Selon les normes CSIAS, les personnes non mariées vivant dans une communauté de résidence et de vie de type familial ne sont en principe pas considérées comme formant une unité d’assistance. Lorsque les partenaires vivent dans un concubinage stable et qu’une seule des deux personnes est bénéficiaire de l’aide sociale, les revenus et la fortune du partenaire non soutenu doivent être pris en compte. Selon les normes CSIAS, un concubinage est considéré comme stable s’il dure depuis deux ans au moins ou que les partenaires vivent ensemble avec un enfant commun. Le Tribunal fédéral indique que cette présomption est réfragable.

Le Tribunal fédéral rappelle qu’à la différence d’un couple marié, il n’y a pas d’obligation légale d’entretien et d’assistance entre les partenaires d’un concubinage. Malgré cela, il est admissible selon la jurisprudence de prendre en compte la circonstance d’un concubinage stable dans le calcul des besoins. Les cantons ont des solutions diverses et il n’est pas arbitraire selon la jurisprudence d’additionner les deux revenus. La prise en compte du revenu du partenaire dans un concubinage stable ne signifie pas qu’il soit assimilé à un couple marié. L’approche est basée sur la solidarité réellement vécue dans un concubinage stable. Le Tribunal fédéral indique qu’il n’y a dès lors pas de violation du principe de l’égalité de traitement.

En l’espèce, les autorités d’aide sociale ont pris en compte, conformément aux normes CSIAS, un budget élargi (soit notamment la prise en compte des impôts courants et du remboursement de dettes; normes CSIAS H.11) pour déterminer la contribution de concubinage de B.

Le Tribunal fédéral indique que, même si en plus de l’enfant commun du couple, des enfants d’une précédente relation vivent dans le ménage, cette façon de procéder n’est pas contraire au droit fédéral. En l’espèce, le partenaire de A. a lui-même indiqué dans sa déclaration d’impôt qu’il supportait ces enfants non communs. En tenant compte du fait que les concubins ont décidé de fonder un ménage avec les enfants non communs, la prise en compte de cette contribution de concubinage n’était donc pas arbitraire.

 

Evaluation des programmes d’emploi temporaire et des stages de l’assurance-chômage

Le Contrôle fédéral des finances (CDF) a évalué les programmes d’emploi temporaire et les stages professionnels proposés par l’assurance chômage. En 2013, 30’000 chômeurs ont effectué un programme d’emploi temporaire (en moyenne durant 3 à 4 mois) et 1’800 chômeurs un stage professionnel (en moyenne 4 mois et demi).

Le CDF s’est basé principalement sur les avis des personnes ayant participé à ces mesures.

Les programmes d’emploi temporaire (PET) externes se déroulent dans des institutions à but non lucratif du marché primaire du travail et visent en premier lieu, à aider les participants à acquérir de l’expérience et à améliorer leurs compétences professionnelles. Quant aux PET internes, il s’agit de postes de travail proposés dans des institutions spécialisées et subventionnés par les pouvoirs publics visant en premier lieu à l’acquisition de compétences sociales (aptitude à travailler en équipe, ponctualité et fiabilité). Le CDF observe que plus la mesure de réinsertion se rapproche du marché du travail, mieux celle-ci est vécue par les personnes. Les stages et les PET externes devraient être mis en oeuvre plus souvent, tandis que les PET internes devraient être utilisés avec plus de retenue. Trop souvent, les participants à un PET déclarent ne pas connaître l’objectif de la mesure et un nombre trop élevé de demandeurs d’emploi n’obtient pas d’attestation écrite à la fin de leur PET.

Le CDF a émis cinq recommandations :

  • Un recours aux programmes d’emploi temporaires davantage axé sur les groupes à risques ;
  • Augmenter le nombre de placements sur le marché primaire et de stages professionnels ;
  • Améliorer la définition et la communication des objectifs et soumettre ces objectifs à un examen périodique ;
  • Améliorer la surveillance grâce à une base de données plus appropriée et en récoltant l’avis des bénéficiaires de mesures ;
  • Améliorer la surveillance des effets des mesures de marché du travail et des mesures nationales

Pour plus d’informations, voir notre rubrique Programmes et mesures d’insertion

Financement résiduel en cas de placement dans un EMS hors canton

Le 21 octobre 2015, le Conseil fédéral a publié un rapport en exécution de deux postulats concernant la compétence pour le financement résiduel lors de prestations de soins fournies en cas de séjour en EMS hors canton. Début septembre 2015, la CSSS-E a mis en consultation un avant-projet de loi sur le même sujet suite à une initiative parlementaire.

L’art. 25a LAMal prévoit depuis 2011 que les prestations de soins dans un EMS et à domicile sont financées par une contribution de l’assurance obligatoire des soins (AOS), par une participation limitée de l’assuré et que les cantons règlent le financement résiduel.

S’agissant de la contribution de l’assurance obligatoire des soins, celle-ci est uniforme dans toute la Suisse. En revanche, le financement résiduel peut varier d’un canton à l’autre (différents pourcentage de la contribution des assurés; taxe de soins maximale).

En cas de placement hors canton, se pose la question de quel canton est compétent. Dans la LAMal, la compétence cantonale est déterminée en fonction du domicile de la personne. S’agissant des prestations complémentaires à l’AVS/AI (PC), le canton de domicile du bénéficiaire est compétent; toutefois, le séjour dans un home ne fonde aucune nouvelle compétence. C’est-à-dire que même si une personne change de lieu de domicile et établit son nouveau lieu de domicile au lieu de l’EMS, les PC restent de la compétence du canton de provenance de la personne assurée.

Dans un arrêt de décembre 2014, le Tribunal fédéral a indiqué qu’ « il manque à l’heure actuelle une réglementation de droit fédéral permettant de déterminer si la compétence quant au financement des coûts des soins non pris en charge par les assurances sociales est indépendante de la question du domicile (à l’instar du droit applicable en matière de prestations complémentaires et d’aide sociale) ou si l’entrée dans un home ou dans un établissement médico-social (valant création d’un nouveau domicile) entraîne la compétence en matière de financement résiduel du canton où se situe l’établissement ». Le Tribunal fédéral a alors indiqué que « jusqu’à l’entrée en vigueur d’une réglementation de droit fédéral, la compétence en matière de financement résiduel dans les rapports intercantonaux se détermine selon le principe du domicile » (ATF 140 V 563).

Dans son rapport, le Conseil fédéral indique qu’une solution analogue aux PC garantirait plus de clarté. Etant donné l’état des travaux en lien avec l’initiative parlementaire sur le sujet, le Conseil fédéral ne fait pas de nouvelle proposition de loi. L’avant-projet de la CSSS-E mis en consultation prévoit en effet de s’aligner sur les PC:

Projet art. 25a al. 5 LAMal : « Le canton de domicile de la personne assurée est compétent pour fixer et verser le financement résiduel. Le séjour dans un établissement médico-social ne fonde aucune nouvelle compétence ».

La CSSS-E indique notamment que si le canton de provenance prend en charge le financement résiduel des prestations de soins également pour un séjour en EMS extracantonal, on peut éviter que les cantons qui disposent de plus de places en EMS que nécessaire pour leur population soient défavorisés financièrement, ce qui encourage une planification intercantonale des EMS.

Toutefois, la CSSS-E indique qu’étant donné que le canton de provenance serait compétent pour la fixation du financement résiduel, les montants qu’il a fixés pourraient être inférieurs à ceux qui seraient nécessaires dans un autre canton pour couvrir les coûts résiduels des soins. Par conséquent, selon la Commission, la personne assurée devra sans doute prendre en charge les coûts restants et si elle n’est pas en mesure de s’en acquitter, les coûts résiduels devraient être pris en charge par le canton de provenance.

L’avant-projet de la CSSS-E est en consultation jusqu’au 18 décembre 2015.

Pour plus d’information voir notre rubrique nouveau régime de financement des soins

Vieillir chez soi : les offres d’aide et les modèles de financement doivent être adaptés

En Suisse, quelque 90% des personnes de plus de 65 ans vivent aujourd’hui chez elles. Leur nombre devrait atteindre environ 2,2 millions d’ici 2030. Cette tendance provoque une flambée des coûts de l’aide et des soins à domicile, et nécessite de nouveaux services pour une partie de cette population. L’étude de Pro Senectute « Agile, puis fragile » met en évidence les lacunes de l’offre dans le secteur de l’aide et des soins à domicile. En complément de cette étude, le Center for Disability and Integration de la Haute école de Saint-Gall (CDI-HSG) a estimé les coûts futurs de l’aide et des soins.

> Communiqué de presse

Pas d’imposition des prestations d’aide sociale

Le Conseil national a rejeté (136 voix contre 28) le 24 septembre 2015 la motion de la Commission de l’économie et des redevances  du Conseil des Etats qui visait à imposer les prestations d’aide sociale. Cette motion avait été acceptée par le Conseil des Etats en décembre 2014. Toutefois, n’ayant été approuvée que par une seule chambre, cette motion est maintenant définitivement enterrée.

Le Conseil national a également tacitement  rejeté une initiative cantonale Bernoise sur le même sujet.

Aide sociale et nationalité: ordonnance en consultation

Le parlement a adopté en juin 2014 la nouvelle loi sur la nationalité. Cette nouvelle loi, qui n’est pas encore en vigueur, prévoit qu’une intégration réussie est une condition de l’octroi de la nationalité et elle énumère des critères d’intégration. Un de ces critères d’une intégration réussie est « la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation ».

Le Conseil fédéral a mis en consultation jusqu’au 19 novembre 2015, un projet d’ordonnance pour notamment préciser ces critères d’intégration. Le Conseil fédéral explique que le critère de la participation à la vie économique doit être entendu dans un sens large et repose sur le principe de l’indépendance financière. Dans son rapport explicatif, il indique que

« le principe doit être considéré comme rempli à partir du moment où les candidats à la naturalisation sont à même de faire face à leurs frais et à leurs obligations d’entretien au moyen de leur fortune personnelle ou de prestations de tiers auxquelles ils ont droit (par ex., prestations des assurances sociales, prestations d’entretien au sens du code civil suisse) ».

En revanche pour le Conseil fédéral, la perception de l’aide sociale doit, en principe, constituer un obstacle à la naturalisation, le bénéficiaire n’étant manifestement pas en mesure de subvenir seul à ses besoins.

Selon le projet mis en consultation :

« Quiconque perçoit une aide sociale dans les trois années précédant le dépôt de sa demande ou pendant sa procédure de naturalisation ne remplit pas les exigences relatives à la participation à la vie économique ou à l’acquisition d’une formation. »

Le Conseil fédéral ne définit pas ce qu’est « une aide sociale » autrement que ce qui est cité plus haut de son commentaire (aide sociale au sens strict ou également d’autres prestations sociales?).

Le Conseil fédéral précise dans son commentaire que les cantons sont libres de prévoir, dans leur législation, des réglementations plus strictes en la matière (par ex., pas de perception de l’aide sociale pendant cinq ans ou remboursement de l’aide sociale perçue).

Toutefois, l’autorité compétente devra tenir compte de manière appropriée de la situation particulière du requérant. Ainsi, il est possible de « déroger » au critère de ne pas à avoir perçu d’aide sociale, lorsque le requérant ne peut le remplir:

  •  «a)    en raison d’un handicap physique, mental ou psychique ;
  • b)    en raison d’une maladie grave ou de longue durée ;
  • c)     pour d’autres raisons personnelles majeures, telles que de grandes difficultés à apprendre, à lire et à écrire, un état de pauvreté malgré un emploi ou des charges d’assistance familiale à assumer. »

Rappel de jurisprudence

Le Tribunal fédéral a eu l’occasion de juger du refus de naturaliser selon le droit cantonal une candidate handicapée en raison de sa dépendance à l’aide sociale. Les personnes qui ont une déficience corporelle, mentale ou psychique sont un groupe protégé par l’art. 8 al. 2 Cst. L’exigence de l’indépendance financière touche de manière spécifique les personnes qui souffrent d’un tel handicap. Ainsi le Tribunal fédéral a jugé qu’une telle exigence constitue une discrimination (indirecte) envers ces personnes et doit être justifiée par intérêt public prépondérant et respecter le principe de proportionnalité. En l’espèce, la personne avait 22 ans, et habitait depuis 13 ans en Suisse comme admise provisoire. Un futur permis de séjour devait être considéré, où la commune devrait de toute façon prendre en charge financièrement cette personne. Il n’y avait dès lors pas d’intérêt financier prépondérant et son refus de nationalité du fait de sa dépendance à l’aide sociale constituait une discrimination indirecte (ATF 131 I 49). Le Conseil fédéral a notamment pris en compte cette jurisprudence pour prévoir les dérogations possibles.

A l’inverse, dans le cas d’un apprenti de 18 ans où le droit de cité lui avait été refusé pour absence d’indépendance financière, le Tribunal fédéral avait indiqué qu’il n’y avait dans le cas d’espèce pas de discrimination au regard de l’origine et de la position sociale (ATF 136 I 309).

Conclusion

En résumé, la loi prévoit le critère de « participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation ».  Dans son message de 2011 concernant la nouvelle loi, le Conseil fédéral disait notamment après s’être référé à la première jurisprudence ci-dessus :

« L’on ne saurait conclure systématiquement qu’une personne ne remplit pas les critères d’intégration au motif qu’elle touche une aide sociale. Dans de telles circonstances, encore faut-il, pour que les critères d’intégration ne soient pas remplis, que la dépendance de l’aide sociale soit imputable à une faute de sa part, la faute étant avérée si le candidat à la naturalisation ne manifeste aucune volonté de participer à la vie économique » (FF 2011 2649, 1.2.2.2).

Le projet d’ordonnance prévoit quant à lui qu’il ne faut pas avoir perçu l’aide dans les trois années précédant le dépôt de sa demande ou pendant sa procédure de naturalisation avec des « dérogations »  possibles (le Conseil fédéral n’a pas mentionné ces dérogations dans son communiqué).