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Consultation sur les nouvelles règles encadrant l’économie domestique, l’assistance et le soutien dans les actes du quotidien

Le 28 novembre 2024, une procédure de consultation a été lancée concernant une révision de l’Ordonnance 2 relative à la loi sur le travail (OLT 2). Cette révision introduit des dispositions spéciales pour encadrer les travailleuses et les travailleurs occupés par des entreprises qui fournissent des prestations d’économie domestique, d’assistance et de soutien dans les actes du quotidien à un ménage privé et qui habitent au sein de ce ménage. Cette initiative fait suite à une décision de principe du Tribunal fédéral[1], qui a élargi le champ d’application de la loi sur le travail à ces relations tripartites entre : ménage privé, entreprise, et travailleuse ou travailleur.

La révision vise en priorité à porter une attention particulière à la délimitation entre le temps de travail et le temps de repos dans ce genre de situation, un enjeu particulièrement crucial puisque ce type de rapport de travail est couramment conclu avec des migrantes et des migrants pendulaires souvent engagés dans ces emplois temporaires aux conditions précaires.   

Les principaux changements sont les suivants :

  • Interdiction de la prise en charge d’une personne 24 heures sur 24 par une seule travailleuse, respectivement un seul travailleur : Pour être conforme à la loi, une telle prise en charge doit être répartie entre plusieurs personnes qui se relaient dans le cadre d’un travail en équipe ;
  • Pause quotidienne : La travailleuse ou le travailleur doit disposer d’une pause d’au moins 60 minutes consécutives par jour ;
  • Temps de repos : Un repos quotidien d’au moins 11 heures est obligatoire. Par ailleurs, la travailleuse ou le travailleur a droit au moins à 35 heures consécutives de repos par semaine sans service de garde ;
  • Dimanche : La travailleuse ou le travailleur doit avoir droit à au moins 12 dimanches de congé par année civile ;
  • Majoration de rémunérations spécifiques : L’indemnisation du service de garde, du travail de nuit et du dimanche doit être majorée ;
  • Saisie de la durée du travail : L’employeur doit mettre à disposition de la personne employée un outil approprié pour saisir différentes données, dont les heures de travail.

Ces nouvelles règles ne s’appliqueront qu’aux entreprises soumises à la convention collective de travail (CCT) étendue régissant le travail temporaire. Puisque cette révision ne concerne que les contrats de prises en charge conclus avec des agences de location de service, elle ne s’appliquera donc pas aux travailleuses et aux travailleurs engagés directement par des ménages privés[2].

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Travail >> Marché du travail >> Emploi précaire ou atypique

Migration >> En général


[1] ATF 148 II 203.

[2] Dans la mesure où la loi sur le travail ne couvre pas les ménages privés (art. 2 al. 1 let. g LTr), un postulat 22.3273 « Arrêt de principe du Tribunal fédéral. Étendre enfin le champ d’application de la loi sur le travail à la prise en charge de personnes âgées 24 heures sur 24 par des migrante pendulaires » a été déposé en mars 2022. Il vise à ce que tous les contrats de prise en charge au sein de ménages privés, y compris ceux conclus uniquement entre un travailleur et un ménage privé, soient soumis à la LTr. Le postulat ayant été adopté en septembre 2023, un rapport du Conseil fédéral est en cours d’élaboration.

« La pauvreté n’est pas un crime » : mise en consultation du projet de loi relatif au droit de séjour en cas de perception d’aide sociale

L’initiative parlementaire « La pauvreté n’est pas un crime[1] » demande que le recours à l’aide sociale ne soit plus un motif de révocation du permis de séjour pour les étrangers qui résident depuis 10 ans ou plus, de manière légale et ininterrompue, en Suisse. Cette initiative a été adoptée par le Parlement en juin 2023.

L’initiative vise à protéger les personnes résidant depuis longtemps en Suisse, voire nées dans le pays, d’une fin de séjour due uniquement à un recours à l’aide sociale. Les seules exceptions prévues dans le texte original sont le fait de délibérément tomber dans la pauvreté ou de ne rien avoir fait pour en sortir. Dans ces deux cas de figure, le permis peut être révoqué.

Fin novembre 2024, la Commission des institutions politiques du Conseil national a mis en consultation un projet de loi relatif à l’initiative parlementaire[2] :

Le projet modifie l’objectif de l’initiative parlementaire « la pauvreté n’est pas un crime » : il ajoute deux nouveaux alinéas 1bis aux articles 62 et 63 de la Loi sur les étrangers et l’intégration, traitant des révocations des permis de séjour et d’établissement, qui indiquent que les autorités doivent examiner si le recours à l’aide sociale est « fautif » ou non, donc si la personne n’a pas fait tout ce qui était en son pouvoir pour ne pas avoir besoin de cette prestation.

Dans le droit actuel, le caractère « fautif » du recours à l’aide sociale doit déjà être examiné par les autorités et les tribunaux dans le cadre de l’examen de la proportionnalité (art. 96 LEI). Comme le souligne le rapport[3], les nouveaux alinéas 1bis représentent en réalité une codification de la jurisprudence actuelle et n’accordent pas de protection supplémentaire aux personnes étrangères qui se retrouvent à l’aide sociale[4].

Rappelons que l’initiative parlementaire « La pauvreté n’est pas un crime » visait à atténuer les conséquences de la perception d’aide sociale pour les personnes de nationalité étrangère résidant depuis longtemps en Suisse. Elle souhaitait corriger une disposition en vigueur au 1er janvier 2019 qui a aboli la protection contre la révocation des permis d’établissement C pour perception d’aide sociale de personnes qui résidaient de manière légale et ininterrompue en Suisse depuis quinze ans et plus[5].

La consultation dure jusqu’au 14 mars 2025. Lien vers le communiqué de presse.

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[1] https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20200451

[2] https://www.parlament.ch/fr/organe/commissions/commissions-thematiques/commissions-cip/rapports-consultations-cip/vernehmlassung-spk-20-451

[3] https://www.parlament.ch/centers/documents/fr/Bericht%20SPK-N%2020.451%20F.pdf, page 7.

[4] Voir à ce sujet les veilles de l’Artias concernant le droit des étrangers, en particulier celle d’août 2000 qui traite des premiers arrêts du Tribunal fédéral sur la perception de l’aide sociale, suite à l’entrée en vigueur de la LEI au 1er janvier 2019, https://artias.ch/artias_veille/consequences-de-la-perception-daide-sociale-dans-la-loi-sur-les-etrangers-et-lintegration-lei-quelques-arrets-du-tribunal-federal-rendus-en-2020-mis-en-contexte/

[5] Voir par exemple https://artias.ch/artias_veille/revision-sur-la-loi-federale-sur-les-etrangers-les-dispositions-concernant-lintegration-entrent-en-vigueur-au-1er-janvier-2019/

Podcasts de l’ADCN : Des histoires humaines pour comprendre les défis du chômage

L’Association de Défense des Chômeurs Neuchâtelois (ADCN) a récemment publié « Au Cœur du Chômage », une série de podcasts en quatre épisodes, qui met en lumière des récits de vie pour explorer des aspects souvent méconnus du chômage, qui peuvent avoir des répercussions importantes sur la vie et les finances des personnes touchées.

Chaque épisode de « Au Cœur du Chômage », réalisé par une équipe qui connaît la problématique de l’intérieur, s’articule autour d’une trajectoire de vie singulière, permettant d’approfondir un thème spécifique lié aux effets du chômage sur le budget et la vie quotidienne. Au-delà des statistiques, cette série aborde les émotions, les questionnements et les espoirs de ceux qui traversent ces situations difficiles. Les auditeurs découvrent des témoignages ainsi que des informations pratiques utiles pour toute personne concernée ou intéressée par la question du chômage.

Les podcasts peuvent être écoutés sur les plateformes suivantes :

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Social >>Assurances sociales >>Chômage

Social >> Pauvreté >> Endettement et surendettement >> Prévention et surendettement

Perspectives >> Participation

Procédure de consultation concernant l’augmentation de la quote-part annuelle en cas de consultation aux urgences

La procédure de consultation de l’initiative parlementaire 17.480 intitulée « Urgences hospitalières. Taxe pour les cas bénins » a débuté le 27 septembre 2024. Le projet de la Commission de la sécurité sociale et de la santé public du Conseil national (ci-après : Commission) qui en découle prévoit une augmentation de 50 CHF de la quote-part annuelle pour chaque consultation aux urgences sans demande écrite préalable d’un médecin, d’un centre de télémédecine ou d’un pharmacien. Cette réglementation ne concernerait pas les femmes enceintes et les enfants. La décision d’introduire ce supplément de quote-part serait laissée à la discrétion des cantons.

Face à une surcharge des urgences hospitalières, les équipes médicales sont mises à rude épreuve et les délais d’attente pour les cas graves augmentent. En 2022, environ 248 consultations aux urgences pour 1 000 habitants ont été recensées en Suisse, avec des disparités cantonales importantes. En imposant une taxe incitative, la Commission espère que les patients se rendront moins souvent aux urgences et favoriseront le recours aux alternatives comme les médecins de famille ou la télémédecine. En d’autres termes, le supplément vise à dissuader les assurés de consulter les urgences pour des cas dits « bénins », ce qui permettrait une gestion plus efficace des situations les plus graves.

À cet égard, il faut souligner que, contrairement à l’initiative parlementaire 17.480, la Commission a décidé d’abandonner la distinction entre cas dits « bénins » et « urgents » afin d’éviter, selon la Commission, une insécurité juridique et l’alourdissement de la charge de travail du personnel médical et soignant. Concrètement, cela signifie que l’augmentation de 50 CHF de la quote-part pour toute consultation dans un service d’urgences serait appliquée indépendamment de la nature urgente ou bénigne du cas traité.

L’impact souhaité est le désengorgement des services d’urgences. Certains craignent cependant un effet de complexification administrative. Par ailleurs, la mesure ne faisant pas de distinction entre les cas bénins et les situations d’urgence, elle pourrait également avoir un effet dissuasif pour les cas présentant une « véritable » urgence. Enfin, l’accès préalable à un professionnel pouvant rédiger une demande écrite n’est pas toujours garanti (par exemple la nuit, ou dans certaines régions). 

La procédure de consultation de ce projet de la Commission est ouverte jusqu’au 10 janvier 2025.

Pour d’autres éclairages, voir notre rubrique Social >> Assurances sociales >> Assurance-maladie (LAMal)

Rentes de veuves et de veufs de l’AVS – Projet du Conseil fédéral

Lors de sa séance du 23 octobre 2024, le Conseil fédéral a adopté le message relatif à la modification de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants[1]. Ce projet fait suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après : CourEDH), de 2022, dans lequel la Suisse a été condamnée pour discrimination à l’égard des veufs[2]. Il répond également au postulat 20.4449 « Supprimer les inégalités de traitement entre veufs et veuves ».

Actuellement, seules les veuves peuvent bénéficier d’une rente de survivant à vie. Les veufs n’y ont droit que jusqu’à ce que leur plus jeune enfant atteigne la majorité[3]. La CourEDH ayant condamné cette disparité, un régime transitoire a été mis en place par l’OFAS afin de permettre aux veufs ayant des enfants de bénéficier d’une rente de survivant à vie[4].

Le projet supprime les rentes de veuves à vie et augmente la durée des rentes de veufs. Par conséquent, les rentes de veuves sont alignées sur les rentes de veufs et la période de formation des enfant(s) est prise en compte, en principe jusqu’aux 25 ans du plus jeune enfant. Selon le Conseil fédéral, le projet permettra ainsi d’éliminer les différences de traitement, présentes dans la loi, entre les hommes et les femmes en matière de rentes de survivants de l’assurance vieillesse et survivants. En outre, ce projet permettrait, s’il entre en vigueur en 2026, une diminution des dépenses de l’AVS d’environ 350 millions de francs, dont 70 millions d’économie pour la Confédération.

Le projet de révision proposé par le Conseil fédéral prévoit les modifications suivantes :

  • Pour les personnes qui deviennent veuves ou veufs après l’entrée en vigueur de la réforme :
    1. Le droit à une rente de survivant sera accordé aux parents survivants – hommes ou femmes – jusqu’aux 25 ans de l’enfant, peu importe leur état civil. En cas de prise en charge d’un enfant en situation de handicap donnant droit aux bonifications pour tâches d’assistance de l’AVS, ce droit sera prolongé au-delà de 25 ans, mais au plus tard jusqu’à ce que le bénéficiaire atteigne l’âge de référence fixé à 65 ans (âge de la retraite) ;
    2. Le droit à une rente de veuvage transitoire de 2 ans pour les personnes n’ayant plus d’enfants à charge. Cela concernera les veuves ou veufs mariés et divorcées qui percevaient une contribution d’entretien de leur ex-conjoint-e ;
    3. Le droit à des prestations complémentaires à l’AVS/AI si les veuves ou les veufs au bénéficie d’une rente de veuvage transitoire étaient âgés d’au moins 58 ans au moment du décès de leur conjoint-e ou ex-conjoint-e et que ce décès a mené à la précarité ;
    4. Dans l’assurance-accidents, le droit à une rente de survivant sera accordé aux veuves et veufs lorsqu’au décès de leur conjoint-e ou ex-conjoint-e (qui verse une contribution d’entretien), ils ou elles ont des enfants qui n’ont plus droit à une rente ou ont atteint l’âge de 45 ans. Dans l’assurance-accidents, les veuves ou et les veufs bénéficient du droit à la rente de survivant à vie (sauf en cas de remariage, de décès de l’ayant droit ou en cas de rachat de rente)[5].
  • Pour les personnes qui perçoivent déjà une rente de veuve ou de veuf avant la réforme :
    1. Le droit aux rentes de veuves et de veufs âgés de 55 ans et plus au moment de l’entrée en vigueur de la révision reste soumis à l’ancien droit. Pour les veufs, cela signifie qu’ils pourront bénéficier d’une rente de survivant à vie, conformément au régime transitoire instauré par l’OFAS à la suite de l’arrêt de la CourEDH ;
    2. La suppression, 2 ans après l’entrée en vigueur de la modification, des rentes de veuves et de veufs âgés de moins de 55 ans au moment de l’entrée en vigueur de la réforme, à moins qu’ils ou elles aient encore un enfant âgé de moins de 25 ans[6] ;
    3. Le droit aux rentes de veuves et de veufs pour les bénéficiaires de prestations complémentaires à l’AVS/AI âgés de 50 ans et plus au moment de l’entrée en vigueur de la révision reste soumis à l’ancien droit. Pour les veufs, cela signifie qu’ils pourront bénéficier d’une rente de survivant à vie, conformément au régime transitoire instauré par l’OFAS à la suite de l’arrêt de la CourEDH.

Il appartient dorénavant au Parlement d’évaluer cette proposition.

Pour d’autres éclairages, voir notre rubrique Social >> Assurances sociales >> Assurance vieillesse et survivants (LAVS)


[1] Communiqué de presse disponible à l’adresse suivante : https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-102876.html. Voir également nos précédentes actualités de l’Artias en la matière : Révision des rentes de veuves et de veufs : ouverture de la consultation, publiée en décembre 2023 ; Projet de révision de la rente de veuve et de veuf du Conseil fédéral, publiée en juillet 2023.

[2] L’Artias a consacré une analyse d’arrêt relative à cette question.

[3] Art. 24 al. 2 LAVS.

[4] Bulletin de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) n° 460 du 21 octobre 2022.

[5] Art. 29 al. 6 LAA.

[6] Cf. Point 1.1.

Les statistiques sur l’endettement de l’OFS / SILC pour l’année 2022 sont sorties

L’enquête SILC (Statistics on income and Living Conditions) est une enquête européenne qui sert à analyser la distribution des revenus, la pauvreté, l’exclusion sociale et les conditions de vie au moyen d’indicateurs comparables dans les 30 pays européens qui participent à l’étude. L’office fédéral de la statistique a récemment publié les chiffres pour la Suisse.

Pas de chiffres – pas de problèmes ?

Relevons tout d’abord que le module sur l’endettement intégré à l’enquête SILC dès 2008 comprenait moins de questions en 2022, ce qui est regrettable, d’autant plus que ce manque de données touche la période de la pandémie de COVID-19. Ainsi, il faudra attendre 2026 pour connaître l’évolution du nombre de ménages dans lesquels une procédure de poursuites a été menée ou un acte de défaut de biens délivré[1]. Le même constat doit être effectué pour les données concernant les cartes de crédit[2].

Par ailleurs, l’absence de différenciation entre endettement et surendettement rend difficile l’interprétation des chiffres présentés : ainsi, la présence d’un crédit personnel (ou encore plus d’une hypothèque), sans autres indications, représente une dette, donc un endettement, mais pas nécessairement un surendettement, contrairement à ce que laissent supposer la présence d’arriérés de paiement, de dettes de types différents et encore plus d’un acte de poursuite. Il en va de même pour les leasings ou les cartes de crédits, des instruments totalement banalisés à notre époque et qui, à eux seuls, ne permettent pas de tirer des conclusions sur le surendettement des ménages qui y recourent.

Ce « mélange des genres » affaiblit par exemple la portée du diagramme illustrant le pourcentage de la population vivant dans un ménage avec des dettes[3], puisqu’y figurent leasing, hypothèque hors résidence principale, arriéré de paiement, dette auprès de proches, achat par acompte, crédit à la consommation, compte à découvert et impayé sur cartes de crédits. Ainsi, une personne possédant une résidence secondaire hypothéquée, un leasing et un prêt à la consommation sera comptabilisée comme « cumulant trois types de dettes », alors qu’il est probable qu’elle ne soit pas surendettée.

Quelques indicateurs du risque de surendettement

En 2022, 12,1% de la population totale vivait dans un ménage avec au moins un arriéré de paiement ; ils étaient 17,7% en 2013, 18,9% en 2017 et 14,9% en 2020[4]. Parmi ces personnes, différencions :

  • Par tranche d’âge : en 2022 les plus nombreux sont les enfants et les jeunes, de 0 à 17 ans, qui sont 19,7% à vivre dans un tel ménage, ce qui contribue à illustrer l’impact d’un enfant sur le budget des familles. Ce constat diffère des années précédentes, pour lesquelles ce sont les personnes de 17 à 24 ans qui forment la majorité de ces ménages, avec une proportion de 23,4% en 2020 (contre 19,7% d’enfants jusqu’à 17 ans) ; 25,4% en 2017 (contre 25,2% d’enfants) et 27,0% en 2013 (contre 21,4% d’enfants).
  • Par statut d’activité : sans surprise, les personnes au chômage étaient 32,9% à vivre cette situation en 2022, contre 11,9% des actifs occupés (39,2% en 2013 ; 43,7% en 2017 et 35,3% en 2020).
  • Par structure du ménage : outre la classe de revenu, qui joue évidemment un rôle[5], les familles monoparentales courent un grand risque de se retrouver dans une situation de surendettement :  19,6% d’entre elles possédaient au moins un arriéré de paiement, soit un ménage sur cinq environ (elles étaient 28,1% en 2013 ; 36% en 2017 ; 26,6% en 2022).

Les raisons du recours à l’endettement sont aussi un bon indicateur de la précarité des situations et du risque de surendettement[6] : Ainsi, nous constatons que les ménages aux revenus les plus élevés financent principalement un bien immobilier (hors résidence principale) ou un véhicule par le crédit. Les ménages aux revenus les plus faibles acquièrent également principalement un véhicule. En revanche, ils financent aussi souvent des dépenses de la vie personnelle, l’achat d’équipement ou d’objets, la couverture de frais de santé ainsi que le remboursement d’autres dettes par le crédit.

Pas de surprises quant aux principales dettes des ménages

Les types d’arriérés de paiement restent les mêmes : il s’agit des impôts, suivis des primes d’assurance-maladie, d’autres factures, puis des factures d’eau, d’électricité, de gaz et de chauffage. Le remboursement de crédits arrive en avant-dernière position, suivi des pensions alimentaires[7]. Les arriérés d’impôts frappent surtout les ménages les plus pauvres, en particulier en présence d’une situation de chômage (19,5% en 2022) ou de privation (30,4%)[8].

Besoin d’un développement des statistiques en matière de surendettement et de poursuites

Des statistiques différenciées permettent de mieux comprendre les phénomènes. Leur manque est criant en matière de poursuites, puisque les statistiques de l’OFS ne différencient pas entre les procédures visant les entreprises et les procédures touchant les particuliers. De même, il n’est pas possible de connaître le nombre de procédures de poursuites en cours, mais uniquement le nombre de commandements de payer[9]. Or, plusieurs commandements de payer peuvent concerner le même débiteur. Espérons que les modifications législatives en cours[10] suscitent un développement des statistiques et procurent des instruments de pilotage plus fins aux responsables des politiques publiques.

Pour d’autres éclairages, voir notre rubrique Social >> Pauvreté >> Endettement et surendettement


[1] Selon les enquêtes SILC précédentes, les ménages qui comprenaient des débitrices ou des débiteurs inscrits dans un office des poursuites s’élevaient à 6.1% de la population totale en 2013, à 7,6% en 2017 et à 6,9% en 2020 (juste avant la pandémie de COVID-19). Source : tableau « Poursuite ou acte de défaut de biens, selon différentes caractéristiques socio-démographiques », https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.assetdetail.32426665.html, consulté le 29.10.2024.

[2] Voir le tableau « Répartition des personnes selon le nombre de cartes de crédit dans le ménage, selon différentes caractéristiques socio-démographiques », https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.assetdetail.32426666.html, consulté le 29.10.2024.

[3] https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.assetdetail.32426723.html, consulté le 29.10.2024.

[4] Source : tableau « Présence et cumul de types de dettes, selon différentes caractéristiques socio-démographiques, https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.assetdetail.32426657.html, consulté le 29.10.2024.

[5] En 2022, 23,4% des arriérés de paiement concernaient des ménages avec un revenu disponible de moins de 33’748 francs et 69% dans les ménages en situation de privation.

[6] Source : diagramme « Pourcentage de la population vivant dans un ménage avec au moins un type de crédits, un compte à découvert ou une facture impayée sur cartes de crédit, en 2022 », https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.assetdetail.32427182.html, consulté le 29.10.2024.

[7] Diagramme « Pourcentage de la population vivant dans un ménage avec au moins un type d’arriéré de paiement, selon le type d’arriéré », https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.assetdetail.32426710.html, consulté le 29.10.2024.

[8] Diagramme : pourcentage de la population dans un ménage avec au moins un arriéré d’impôt, https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home.assetdetail.32426717.html, consulté le 29.10.2024.

[9] https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/aktuell/agenda.assetdetail.31186341.html, consulté le 29.10.2024.

[10] Sur le site de l’Artias, voir notamment la veille législative (https://artias.ch/artias_veille/synthese-travaux-legislatifs-federaux/) ainsi que l’onglet « endettement et surendettement» du portail thématique, https://artias.ch/artias_theme/endettement/, consultés le 29.10.2024.

Mieux tenir compte des besoins des enfants et des jeunes à l’aide sociale

La Charte Aide Sociale a mandaté une étude sur la situation des enfants et des jeunes vivant dans a pauvreté. Ses résultats ? Actuellement, les prestations fournies par l’aide sociale sont insuffisantes et il existe des lacunes au niveau de la couverture du minimum vital. On distingue en principe deux types de problématiques. Premièrement, le montant du forfait pour l’entretien augmente trop peu pour chaque enfant supplémentaire d’un ménage, de sorte qu’il est trop bas, surtout pour les familles nombreuses. De plus, les normes CSIAS prévoient les mêmes prestations d’aide pour les enfants en bas âge que pour les jeunes – contrairement aux prestations complémentaires échelonnées en fonction de l’âge. 

Par ailleurs, le versement des prestations circonstancielles destinés à couvrir des besoins particuliers (un loisir p.ex.) varie fortement selon les services sociaux. Du point de vue du droit également, la situation est insatisfaisante : en particulier, l’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas systématiquement pris en compte, tout comme sa participation et les normes de droit constitutionnel et international qui concernent le minimum vital social des enfants doivent être plus fortement ancrées dans le droit cantonal de l’aide sociale et systématiquement prises en compte dans le développement continu du droit de l’aide sociale.

L’étude se penche aussi sur la situation des enfants et des jeunes qui perçoivent une aide sociale réduite en raison de leur statut de séjour. Le montant de cette aide sociale réduite varie entre les cantons, avec des forfaits pour des besoins de base estimés de 14% à 52% plus bas que ceux prévus dans l’aide sociale ordinaire. La couverture des besoins de base de ces enfants et jeunes est extrêmement précaire et insuffisante, une situation néfaste à leur bien-être et à leur développement[1].

Liens :

Pour d’autres éclairages, voir nos rubriques :

Social >> Pauvreté >> Pauvreté des enfants

Social >> Aide sociale

Familles >> Enfance >> Plus de chances pour tous les enfants


[1] Cet état de fait a été thématisé par deux études également récentes, sur mandat de la Commission fédérale des migrations, voir p.ex. https://artias.ch/2024/10/enfants-a-laide-durgence-menaces-dans-leur-sante-et-leur-developpement/, consulté le 29.10.2024.

Révision de la loi sur l’aide sociale du canton de Berne : prise de position de la CSIAS

Dans le cadre de la procédure de consultation, la Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS) a pris position sur le projet de révision totale de la loi sur l’aide sociale du canton de Berne.

Selon le Conseil exécutif du canton de Berne, le projet de loi permettrait entre autres des simplifications dans le traitement administratif ainsi que des incitations pour les bénéficiaires de l’aide sociale et pour les communes, tout en laissant les prestations d’aide sociale inchangées.

Dans sa prise de position, la CSIAS relève que si le projet de loi apporte une nouvelle systématique et une base légale pour la numérisation, il se focalise trop sur le contrôle et les sanctions et néglige l’approche orientée vers les ressources, notamment dans les domaines de l’intégration sociale et professionnelle. De ce fait, le projet de loi ne respecte pas assez les objectifs de l’aide sociale définis par la CSIAS.

Voir également les prises de position de :

Pour d’autres éclairages, voir notre rubrique Social >> Aide sociale >> Normes CSIAS

Enfants à l’aide d’urgence menacés dans leur santé et leur développement

La Commission fédérale des migrations (CFM) a publié récemment deux études : l’une a recueilli dans toute la Suisse des données sur les conditions de vie des personnes mineures vivant à l’aide d’urgence[1], l’autre qualifie juridiquement les conclusions de la première[2].

Se basant sur les résultats de ces études, la CFM pose un constat sans appel : malgré les différences cantonales, tous les enfants et les adolescentes et adolescents concernés sont menacés dans leur santé, leur développement et leur bien-être.

La première étude, commandée au Marie Meierhofer Institut für das Kind, montre que la santé mentale des mineures et mineurs concernés est gravement affectée, surtout pour celles et ceux vivant dans des structures d’hébergement collectifs. Ces enfants et ces jeunes sont exposés à des évènements traumatisants, comme de la violence, des suicides ou des expulsions forcées. Ils vivent dans des endroits isolés, souvent dans une chambre pour toute la famille. L’isolement social, le manque de perspectives et l’impuissance nuisent à leur développement et à leur santé.

Les conditions de vie des ces enfants et adolescentes et adolescents doivent donc être changées, en particulier, l’aide d’urgence ne devrait pas être perçue sur une longue durée et il faut s’assurer que les enfants et les jeunes puissent se développer, participer à la vie sociale et reçoivent un minimum vital décent, ce qui inclut notamment les soins médicaux, un logement décent ainsi que des possibilités de loisirs et de stimulation pour les plus jeunes d’entre eux.

Sur la base de l’étude sur les conditions de vie, l’analyse juridique de la faculté de droit de l’Université de Neuchâtel arrive à la conclusion que les conditions de vie des enfants et des jeunes concernés ne sont conformes ni à la Constitution fédérale, ni à la Convention des Nations Unies relatives aux droits de l’enfant. Le rapport demande un changement de paradigme : les autorités doivent placer le bien-être de l’enfant au centre de toute décision relevant du domaine des migrations.  

La CFM demande aux acteurs politiques et aux autorités d’application d’améliorer substantiellement les conditions de vie des enfants et des adolescentes et adolescents à l’aide d’urgence, par des changements législatifs et par l’exploitation des marges de manœuvre. Et souligne que les droits de l’enfant s’appliquent indépendamment du statut de séjour.  

Pour d’autres éclairages, voir nos rubriques Migration >> Asile >> Aide d’urgence et Familles >> Enfance >> Loi sur l’asile et convention droits de l’enfant


[1][1] Lannen, Patrizia ; Paz Castro, Raquel ; Sieber, Vera : Enfants et adolescents à l’aide d’urgence dans le domaine de l’asile. Enquête systématique sur la situation en Suisse, éditée par la Commission fédérale des migrations, CFM, Berne, 2024.

[2] Amarelle, Cesla ; Zimmermann, Nesa : Le régime d’aide d’urgence et les droits de l’enfant, avis de droit et étude de conformité à la lumière de la Constitution fédérale suisse et de la Convention relative aux droits de l’enfant, éditée par la Commission fédérale des migrations, CFM, Berne, 2024.

Session parlementaire fédérale – Automne 2024

Lors de la dernière session parlementaire fédérale[1], les Chambres ont pris plusieurs décisions d’importance, notamment en matière d’assurances sociales et de protection des travailleuses et travailleurs, de droit des personnes étrangères et de lutte contre la pauvreté et l’endettement.

Assurances sociales

Dans le domaine de l’assurance-invalidité, la motion 23.3808 qui vise à accélérer la procédure AI et à garantir la sécurité financière des assurées et assurés durant celle-ci, a été transmise au Conseil des États. Cette motion soutenue par le Conseil national, malgré l’opposition du Conseil fédéral, reflète une volonté d’améliorer la protection des assurés et assurées face aux périodes d’attente, pouvant parfois s’étendre sur plusieurs années et engendrer une précarité financière dans certains cas.

Dans le domaine de l’assurance-maladie, plusieurs objets parlementaires en lien avec la réduction des coûts de l’assurance-maladie (p. ex. modèle d’assurance budget ; indexation des primes d’assurances aux coûts de la santé) ont été liquidés. En revanche, la motion 24.3636, soutenue par le Conseil fédéral, qui propose d’augmenter la franchise minimale et de l’adapter périodiquement à l’augmentation des coûts dans l’assurance obligatoire des soins, a été adoptée par le Conseil des États et transmise au Conseil national.    

Assurance-chômage et protection des travailleuses et travailleurs

Trois objets importants ont également émergé concernant l’assurance-chômage. L’initiative parlementaire 20.406, qui vise à assurer que les entrepreneuses et entrepreneurs cotisants à l’assurance-chômage soient eux aussi couverts en cas de perte d’emploi, est renvoyée à la commission du Conseil des États. Par ailleurs, la motion 24.3653, qui demande notamment que les femmes enceintes n’arrivent plus en fin de droits de l’assurance-chômage et que des allocations pour perte de gain soit octroyées en cas d’interdiction d’affection prononcée par un médecin, a été transmises à la commission compétente pour un examen préalable. Enfin, la motion 24.3581, qui propose un versement simplifié des indemnités pour intempéries lors des jours de forte chaleur dans les branches d’activité où la santé des travailleuses et travailleurs est mise en danger en été, a été adoptée par le Conseil des États et transmise au Conseil national.

Droit des étrangers

Dans le domaine du droit des étrangers, des discussions sur le regroupement familial, la protection des personnes réfugiées mineures ainsi que le statut S ont dominé. Les deux motions 24.3057 et 24.3511 visant à interdire le regroupement familial aux personnes étrangères admises à titre provisoire, toutes deux rejetées par le Conseil fédéral, ont été transmises, pour la première, au Conseil des États et, pour la seconde, à la commission compétente pour un examen préalable. Quant au postulat 24.3478 proposant d’introduire des cartes de paiement, remplaçant l’argent liquide, pour les requérantes et requérants d’asile, il a été adopté par le Conseil national et transmis au Conseil fédéral.  

Lutte contre la pauvreté et l’endettement

La motion 23.4450, qui propose de reconduire le programme de prévention contre la pauvreté et d’adopter une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, a été adoptée par les deux Chambres et transmise au Conseil fédéral. Enfin, la motion 23.3554 visant à encadrer et plafonner les frais des sociétés de recouvrement a été adoptée par le Conseil national et transmise au Conseil des États. 


[1] Voir la synthèse des travaux législatifs fédéraux publiée par l’Artias en octobre 2024.