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Qualité pour agir des services sociaux lors d’un refus de prestation d’une assurance sociale à l’encontre de l’un-e de leur bénéficiaire.

Arrêt 8C_583/2022 du 22 mars 2023, suggéré pour publication

L’Office AI rejette une demande de prestation de Monsieur A., qui perçoit des prestations d’aide sociale, en envoyant la décision à l’assuré uniquement. Le service social recourt contre la décision auprès du tribunal cantonal, qui n’entre pas en matière, estimant que le service social ne possédait pas la légitimation pour recourir. Ce dernier recourt alors auprès du Tribunal fédéral.

La Haute cour rappelle qu’en vertu de l’art. 34, al.1 de la Loi fédérale sur la procédure administrative (PA), une décision doit être notifiée à toute partie ayant la légitimité pour recourir (arrêt 8C_98/2022).

Un service social ne possède pas de légitimité générale pour recourir uniquement en raison du versement de prestations. La légitimation pour recourir exige que ses intérêts directs soient touchés de manière concrète : il doit avoir une proximité qualifiée avec l’affaire litigieuse (ATF 133 V 188). Cela est le cas lorsque la ou le bénéficiaire est soutenu de manière régulière par l’aide sociale.

Par ailleurs, la légitimation doit exister au moment du dépôt du recours, il n’est pas nécessaire qu’elle le soit au moment de la notification de la décision.

Dans le cas d’espèce, Monsieur A., tout d’abord soutenu par l’assurance-chômage, a perçu, entre 2021 et 2022, quelques 48’000.- francs d’aide sociale. L’intérêt digne de protection du service social à recourir contre la décision de l’Office AI est par conséquent donné, tout comme sa légitimation a recourir.

Le recours du service social est admis.

Le Tribunal fédéral confirme et précise sa jurisprudence sur le statut des chauffeurs Uber

Dans un arrêt du 16 février 2023[1], le Tribunal fédéral a tranché le litige qui opposait la Caisse de compensation de Zurich et Uber B.V., les deux parties ayant formulé un recours contre le jugement du Tribunal des assurances sociales de Zurich du 20 décembre 2021.

La Haute cour s’est penchée sur plusieurs questions litigieuses, dont trois seront traitées ci-après : le statut des chauffeurs Uber, la « présomption » de statut de salarié pour les chauffeurs Uber et l’existence d’un établissement stable en Suisse.

  1. Statut des chauffeurs Uber
    Le Tribunal fédéral confirme sa jurisprudence : les chauffeurs Uber exercent une activité lucrative dépendante. En effet, les directives édictées par Uber B.V. laissent peu de marge de manœuvre aux chauffeurs, le respect de ces instructions est contrôlé par le biais de l’application, le rapport de subordination existe dans des domaines essentiels et les chauffeurs ne supportent pas ou peu le risque de l’entrepreneur (réalisation d’investissements importants, supporter le risque d’encaissement, emploi de personnel, locaux commerciaux propres, etc).
    L’argumentation du Tribunal fédéral s’agissant du statut de salarié des chauffeurs Uber a été développé dans la veille législative : « le statut de salarié des employé-e-s Uber »[2].
  2. « Présomption » de statut de salarié pour les chauffeurs Uber
    Le Tribunal des assurances sociales de Zurich a estimé nécessaire que la Caisse de compensation étudie au cas par cas la relation entre les chauffeurs Uber et Uber B.V. afin de déterminer leur statut. Au vu du grand nombre de chauffeurs (près de 600), la Caisse de compensation a exigé une décision en constatation. Par une telle décision, le Tribunal définit un chauffeur « type » pour lequel le statut de salarié est admis. Ce constat permet ainsi d’éviter de procéder à un examen individuel de chaque relation contractuelle entre Uber et les différents chauffeurs.
    Le Tribunal fédéral a accepté cette demande. Seuls les chauffeurs employant leurs propres chauffeurs salariés ou qui gèrent l’activité Uber par l’intermédiaire d’une personne morale ne sont pas d’emblée considérés comme salariés, leur statut devant être examiner au cas par cas.
  3. Existence d’un établissement stable en Suisse
    Cette question est centrale pour déterminer l’étendue de l’obligation de cotiser de Uber B.V., employeur des chauffeurs. En effet, cette société a son siège au Pays-Bas, si elle dispose d’un établissement stable en Suisse, elle sera tenue de payer des cotisations pour tous ses employés selon la loi sur l’assurance vieillesse et survivants[3]. En revanche, dans le cas contraire, l’obligation de cotiser est fixée par les accords signés avec l’Union européenne. Or, ces accords ne s’appliquent qu’aux ressortissants suisses et aux ressortissants membres de l’UE/AELE. Autrement dit, les chauffeurs, ressortissants d’Etats tiers, seraient considérés comme des salariés dont l’employeur n’est pas tenu de payer des cotisations et devraient verser eux-mêmes des cotisations s’élevant à 8,7% de leur salaire, sauf si l’employeur est d’accord d’en verser la moitié[4]. En droit des assurances sociales, la notion d’établissement stable est plus large qu’en droit fiscal. En effet, pour être reconnu comme tel, il n’est pas nécessaire qu’une partie qualitativement ou quantitativement importante de l’activité commerciales soit exercée dans l’établissement stable. Il s’avère que Uber Switzerland Sàrl met à disposition de Uber B.V. des bureaux de manière permanente à Zurich et qu’une partie de son activité commerciale s’y déroule, les conditions pour admettre un établissement stable sont donc remplies. Uber B.V. est donc tenu de payer les cotisations de tous ses employés. 

Cet arrêt, bien que concernant les chauffeurs zurichois, est applicable dans toute la Suisse. Les employé-e-s d’Uber, en passant à un statut de salarié, voient leur protection sociale nettement améliorée (chômage, protection en cas de maladie, etc.) et leurs charges sociales diminuées. De plus, en tranchant la question de l’existence d’un établissement stable et en définissant un chauffeur « type » pour lequel le statut de salarié est reconnu, le Tribunal fédéral a grandement facilité le travail des caisses de compensation souhaitant recouvrer les cotisations sociales dues.

> Pour d’autres éclairages, voir notre rubrique  Travail >> Marché du travail >> Emploi précaire ou atypique >> Travail atypique et protection sociale


[1] Arrêts 9C_70/2022, 9C_76/2022 du 16 février 2023, voir aussi le communiqué de presse du Tribunal fédéral

[2] Arrêt 2C_34/2021 du 30 mai 2022, traité dans une veille législative de l’ARTIAS : « Le statut de salarié des employé-e-s d’Uber ».

[3] Art. 12 al. 2 LAVS.

[4] Art. 6 LAVS.

Hausse du taux d’intérêt maximal pour les crédits à la consommation

Dans un communiqué du 3 avril 2023, le Conseil fédéral annonce l’augmentation du taux d’intérêt maximal pour les crédits à la consommation de 1%. Dès le 1er mai 2023, ce taux s’élèvera à 11% pour les crédits au comptant et à 13% pour les crédits par découvert (cartes de crédit par exemple).

Le taux d’intérêt maximal pour les crédits à la consommation est calculé à l’aide d’une formule inscrite dans l’Ordonnance relative à la loi sur le crédit à la consommation. Le Département fédéral de justice et police doit réexaminer ce taux d’intérêt maximum au moins une fois par année et l’adapter si nécessaire.

Cette augmentation ne concernera que les crédits conclus à partir du 1er mai 2023, le taux d’intérêt maximal ne sera pas adapté pour les contrats déjà en cours.

Qui sont les retraité-e-s qui ne demandent pas les prestations complémentaires ?

Une nouvelle étude de la Haute école zurichoise de sciences appliquées (ZHAW) fournit pour la première fois des estimations à l’échelle nationale sur la question du non-recours aux prestations complémentaires (PC) à l’AVS. 

Conclusion de cette étude : les retraité-e-s qui ont les plus de risques de ne pas demander les PC sont les femmes, les personnes veuves ou vivant seules. Deux autres aspects déterminants sont la formation et la nationalité : un peu plus d’un tiers des retraités qui n’ont pas de formation au-delà de l’école obligatoire ne demandent aucune PC, alors qu’ils y auraient droit. La part des retraités de nationalité étrangère à ne pas toucher ces aides est plus de deux fois supérieure à celle des retraités suisses.

Les raisons du non-recours : la méconnaissance des droits ; le fait de ne pas vouloir demander des prestations de l’Etat ; les difficultés de la démarche ainsi que les sentiments de honte ou de peur. Les personnes de nationalité étrangère nourrissent également des craintes concernant leur droit au séjour.

> Pour d’autres éclairages, voir notre rubrique Social >> Pauvreté >> Qualité de vie et pauvreté

Baisse des dépenses de l’aide sociale en 2021

La statistique différencie entre deux types d’aide sociale : l’aide sociale au sens large et l’aide sociale proprement dite.

La première comprend l’ensemble des prestations sociales sous conditions de ressources, donc visant à garantir un minimum vital – différent selon les prestations – à des personnes qui ne l’atteignent pas. La seconde, aussi appelée « aide sociale économique », concerne uniquement les prestations versées aux bénéficiaires de l’aide sociale.

L’aide sociale au sens large englobe donc non seulement l’aide sociale proprement dite, mais aussi les prestations complémentaires à l’AVS/AI, les aides aux chômeurs, les aides à la famille, les avances sur pensions alimentaires ou encore l’aide au logement.

En 2021, les dépenses d’aide sociale au sens large se sont élevées à 8,8 milliards de francs. Elles ont été versées à 804 966 personnes, soit 9,3% de la population résidante permanente. L’augmentation des dépenses pour ces prestations est moins élevée en 2021 (+ 0,7%) qu’en 2020 (+ 1,8%).

Les dépenses pour l’aide sociale économique, quant à elles, s’élèvent à 2,8 milliards de francs en 2021 et ont diminué de 34 millions de francs (-1,2%) par rapport à l’année précédente. Cette tendance à la baisse s’observe depuis trois ans. Soulignons que le nombre de bénéficiaires de l’aide sociale économique a diminué de 2,5% par rapport à l’année précédente, mais que les dépenses moyennes nettes par bénéficiaire ont augmenté de 1,4% en termes nominaux.

> Autres éclairages sur notre thème Social >> Aide sociale >> Statistiques de l’aide sociale

De l’argent ou des enfants – il faut choisir

Cette injonction reste surtout valable pour les mères : une étude commandée par l’OFAS montre que les familles définissent la répartition du temps passé au travail et à s’occuper d’enfants à la naissance du premier enfant et que cette répartition demeure. Cela entraîne une cascade de conséquences sur l’évolution des salaires et des rentes des parents.

Une première constatation est que le passage à la parentalité va souvent de pair avec une détérioration de la situation économique, due tant aux frais supplémentaires liés à l’enfant qu’à la réduction du temps de travail, la plupart du temps des mères. Des possibilités de gardes institutionnelles réduisent cette baisse de revenu.

En particulier, les séparations et les divorces sont source de précarité financière, surtout chez les mères. En effet, le revenu de l’activité lucrative des pères ne se modifie guère après la naissance du premier enfant, tandis que les mères subissent à long terme une perte de revenu de 67% par rapport aux pères.

Soulignons également que le revenu des mères n’a pas évolué au fil du temps : dix ans après l’accouchement, les jeunes générations de mères prises en compte dans l’étude ne gagnaient pas beaucoup plus que les mères des générations précédentes.

Lien vers l’article dans « Sécurité sociale CHSS » 

> Autres éclairages sur notre rubrique Familles >> Politique familiale >> Conciliation vie familiale et vie professionnelle

Répartition de la richesse en Suisse

Le Conseil fédéral a pris connaissance, en décembre 2022, du troisième et dernier rapport sur la répartition des richesses[1]. À son origine, un postulat qui demandait d’effectuer régulièrement un état des lieux sur la répartition effective de la richesse en Suisse, et de présenter, dans ce cadre, l’évolution du revenu, du patrimoine et des charges fiscales des plus hautes fortunes.

Les auteurs du rapport constatent notamment une influence de la pandémie de COVID-19 sur les dépenses des ménages et estiment à nouveau que le standard de vie en Suisse se trouve parmi les plus élevés d’Europe, ceci alors que l’inégalité des revenus se situe au-dessous de la moyenne européenne.

Grandes disparités régionales

Globalement, les communes des régions alpines et préalpines et du massif jurassien présentent les revenus les plus modestes, à l’exception de quelques centres touristiques. Les niveaux les plus élevés se rencontrent plutôt au niveau du plateau suisse, principalement dans les cantons de Zoug-Schwyz-Nidwald, de Zurich, d’Argovie, de Bâle et au bord du lac Léman.

Les revenus ne sont également pas répartis de manière égale dans les régions : ils le sont le plus inégalement dans les Canton de Schwyz, de Genève et de Zoug et le moins inégalement dans les cantons d’Uri, d’Argovie, de Glaris et de Soleure.

Contribuables aux hauts revenus

En Suisse, 16,24 % des contribuables ont un revenu net soumis à l’impôt fédéral direct supérieur ou égal au double du revenu médian (année 2018). Ces «riches» détiennent à eux seuls 44,89 % de la masse totale des revenus du pays et couvrent 83,52 % des entrées de l’impôt fédéral direct. Ces contribuables sont plus fréquents dans les Cantons de Zoug, de Schwyz de Zurich et de Bâle-Campagne et moins fréquents en Valais, au Jura, à Uri et à Glaris. La part des ménages au revenu supérieur ou égal au double du revenu médial a légèrement augmenté de 2010 à 2018.

Répartition de la fortune

Enfin, la fortune nette par contribuable a augmenté entre 2015 et 2018. Pendant la même période, la part de la fortune des 1% de personne les plus riches a augmenté de 38% à 44%.

Lien vers le rapport : https://www.efd.admin.ch/dam/efd/fr/das-efd/gesetzgebung/berichte/bericht-wohlstand.pdf.download.pdf/rapport-repartition-richesse.pdf


[1] Il s’agit du Rapport du Conseil fédéral en réponse au postulat 15.3381 déposé par la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national le 14 avril 2015. https://www.efd.admin.ch/dam/efd/fr/das-efd/gesetzgebung/berichte/bericht-wohlstand.pdf.download.pdf/rapport-repartition-richesse.pdf

Du tourisme social ? Ces chercheurs n’en ont pas rencontré.

Une étude d’une équipe de l’école polytechnique fédérale de Zurich s’est penchée sur les comportements des personnes migrantes bénéficiaires de l’aide sociale en Suisse. Alors qu’il existe des disparités significatives entre les cantons en matière d’aide sociale, est-il possible d’observer un déplacement de population vers les régions qui leur seraient les plus favorables ?

La conclusion de l’étude démontre que ce n’est pas le cas. Les déménagements ne sont pas motivés par une aide sociale plus généreuse. Au contraire, ils répondent à d’autres motivations : parmi celles-ci, vivre dans une plus grande ville, trouver un logement moins onéreux ou rejoindre des compatriotes.

Lien vers l’étude (en anglais) : https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1111/ajps.12766  

Personnes concernées par la pauvreté : quelle(s) formation(s) ?

Une étude récente, commandée par la Plateforme nationale contre la pauvreté[1], se concentre sur les difficultés que les personnes concernées par la pauvreté et peu qualifiées rencontrent pour accéder à une formation. Des entretiens détaillés ont été menés avec 80 personnes peu qualifiées et menacées ou touchées par la pauvreté dans les trois grandes régions linguistiques de Suisse d’octobre 2021 à janvier 2022. 57 entretiens avec des spécialistes des domaines de la formation, des affaires sociales et des collectifs autogérés complètent les résultats.

Modèle explicatif

L’analyse de ces différents entretiens a permis de créer un modèle mettant en évidence les interactions entre la situation socio-économique des personnes et l’impact que les injonctions de la société ont sur eux. Quatre facteurs influencent les priorités et les stratégies en matière de formation :

  • facteurs situationnels : contraintes sociales due à la situation de vie (famille monoparentale, plus de 50 ans, etc.) ;
  • facteurs dispositionnels : attitude spécifique envers l’idée de formation en raison du parcours de vie (manque de confiance en soi à cause de mauvaises expériences à l’école, préférence pour l’apprentissage pratique, etc.) ;
  • facteurs structurels : structures inégalitaires et discriminantes profondément ancrées dans la société (manque d’offres d’accueil extrafamilial pour enfants, cotisations sociales élevées dans le 2epilier passé 50 ans, etc.) ;
  • facteurs institutionnels : accès limité aux offres de conseil et aux aides financières (conception même de l’assurance-chômage, conditions d’octroi de l’aide sociale, etc.).

Difficultés d’accès à la formation et injonctions de la vie

Plusieurs problématiques ressortent des facteurs mentionnés : les difficultés financières combinée au non-accès aux offres (financées) de formation et de conseil s’avèrent décisifs dans la faible participation à la formation. C’est encore plus marquant lorsque le financement par l’aide sociale n’entre pas en ligne de compte pour fournir une sécurité matérielle (car droit inexistant ou non-recours volontaire). De plus, le désir de suivre une formation est la plupart du temps en concurrence avec d’autres nécessités et besoins tout aussi importants, comme l’obligation d’assurer sa subsistance ou le besoin de repos. Il existe également une forte injonction sociale à assurer soi-même la couverture de ses besoins vitaux, pression qui peut mener à miser sur la stabilité professionnelle plutôt que sur la formation.

Pistes d’amélioration

Le rapport met en évidence l’indispensabilité de créer des financements plus nombreux et plus efficaces pour permettre aux personnes en difficulté financière de suivre une formation initiale ou continue. Les structures et les offres doivent mieux intégrer la possibilité de conjuguer emploi, formation et prise en charge d’enfants ou de proches. Il importe également de faciliter la reconnaissance des formations non formelles, informelles ou suivies à l’étranger   et l’implication des employeurs doit également être renforcée. Par ailleurs, il faut créer des offres d’information professionnelle, faciles d’accès et indépendantes de l’aide sociale. Les conseils et le suivi doivent être coordonnés au niveau interinstitutionnel et les offres proposées plus souvent sous forme de modules. De manière générale, la question de la formation et de la promotion de la formation doit tenir compte des contraintes liées à la pauvreté.

Pour d’autres éclairages, voir nos rubriques Social >> Pauvreté >> Lutte contre la pauvreté et Travail >> Former pour insérer


[1] Cette étude, publiée le 19 janvier 2023, a été réalisée par l’Université des sciences appliquées de Zurich (ZHAW), en coopération avec la Haute école de travail social (HETS) et la Scuola universtaria professionale della Svizzera italiana (SUPSI).

Rapport sur les mesures d’incitation au travail pour les retraité-e-s

Le 16 décembre 2022, le Conseil fédéral a publié son rapport donnant suite au postulat 19.3172 de Peter Hegglin appelé « Promouvoir le maintien dans la vie active après l’âge réglementaire de la retraite ». La volonté de ce postulat est de pallier le déficit d’emploi que l’arrivée à l’âge de la retraite des personnes nées pendant les années à forte natalité créera.

Actuellement, une fois l’âge de 64 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes atteint, les assuré-e-s ont droit à une rente de vieillesse sans réduction ni majoration. 88% des assuré-e-s choisissent de commencer à percevoir leur rente à ce moment-là. Un tiers des personnes assurées, toutes catégories confondues, continue d’exercer une activité lucrative à la retraite. Selon l’étude « Qui prend quand sa retraite ? Passage à la retraite : parcours et déterminants », ce sont le contexte institutionnel, des facteurs propres au travail ou à l’entreprise, le parcours professionnel de la personne concernée et l’influence du ou de la partenaire qui explique ce maintien dans le marché du travail après l’âge de la retraite.

Il n’existe aujourd’hui que peu d’incitations pour maintenir les travailleurs et les travailleuses sur le marché du travail après l’âge légal de la retraite. Les personnes à la retraite ont le droit à une franchise sur le revenu de CHF 1’400.- par mois (CHF 16’800.- par an) sur laquelle aucune cotisation AVS/AI/APG n’est prélevée.

Avec la réforme AVS 21, l’âge de la retraite sera la même pour les hommes et les femmes : 65 ans. Elle flexibilise les possibilités de perception de la rente et crée aussi des mesures d’incitation plus efficaces selon le rapport pour promouvoir une activité lucrative après 65 ans. La réforme introduit notamment des rentes partielles. L’assuré-e peut choisir une rente partielle dans une fourchette allant de 20 % à 80 %. La perception d’une rente partielle devient possible tant dans le cas d’une anticipation que dans celui d’un ajournement. Cette nouveauté permet à l’assuré-e d’aménager une transition progressive vers la retraite entre ses 63 ans et ses 70 ans, et encourage en particulier le maintien d’activités lucratives à temps partiel.

De plus, L’AVS 21 prévoit une anticipation et un ajournement mensuels. Cette révision, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2024, permettra aux assuré-e-s de commencer à percevoir leur rente (incomplète avant 65 ans) au début de n’importe quel mois entre leur 63e et leur 70e année de vie. Le rapport conclut qu’avec les mesures de la réforme AVS 21, la prévoyance vieillesse et la fiscalité auront suffisamment de moyens pour rendre attractif l’activité professionnelle après l’âge de la retraite.

En matière fiscale, les personnes retraitées sont imposées sur la somme des revenus issus de leur prévoyance vieillesse et de leur activité lucrative, ce qui entraîne une imposition inhabituellement élevée en raison de l’effet de progression. Pour changer ce phénomène, cela nécessiterait néanmoins de créer une base constitutionnelle.

Pour d’autres éclairages, voir notre rubrique Social >> Assurances sociales >> Faits et chiffres