Tous les articles par secretariat

Winterthur : une réduction de la charge de travail des AS permet de réaliser des économies

De septembre 2015 à février 2017, la Ville de Winterthur et une équipe de recherche de la Zürcher Hochschule für Angewandte Wissenschaften (ZHAW) ont mené un projet pilote afin d’examiner les effets d’une réduction de la charge de dossiers des assistantes et assistants sociaux (AS) sur les coûts par dossier et le taux de sortie de l’aide sociale. Le service d’aide sociale de Winterthur se distinguait à ce moment-là par un nombre moyen de dossiers par AS très élevé (jusqu’à plus de 140).

Pendant 18 mois, le nombre de dossiers de trois AS a été limité à 75 par poste à 100%, tandis que les autres AS conservaient leur charge de 124 à 143 dossiers. En comparant les statistiques du groupe pilote et du groupe témoin, l’équipe de recherche a pu calculer que le groupe pilote, grâce à un accompagnement plus étroit des bénéficiaires, avait réalisé une économie moyenne d’environ 1’452 Fr. par cas et par an, ce qui représentait au total un potentiel de plus de 4 millions de francs de réduction des coûts pour la ville de Winterthur, si la charge de tous les AS était réduite à 75 dossiers maximum. Les résultats de ce projet-pilote ont été publiés dans un rapport de novembre 2017, qui a été récemment traduit en français.

Pour donner suite à ces premiers résultats encourageants, le conseil municipal de Winterthur a décidé d’augmenter les ressources en personnel afin d’alléger la charge de travail de l’ensemble des AS du conseil social, cela pour une période limitée à quatre ans. Le Bureau BASS a été mandaté pour suivre cette réduction globale de la charge de travail (de plus de 120 dossiers à moins de 80) et en a présenté les effets dans un rapport.

La réduction de la charge de travail a conduit ce que les AS disposent désormais d’une meilleure vue d’ensemble de leurs dossiers et de davantage de temps pour conseiller et accompagner les bénéficiaires, si nécessaire de manière approfondie. Cela s’est traduit par une diminution des coûts mensuels de 75.50 Fr. par dossier, soit une diminution de 3,6 %.

Par ailleurs, le taux de sortie de l’aide sociale a augmenté de 27%, ce qui s’explique par deux facteurs. D’une part, par des sorties en lien avec l’exercice d’une activité professionnelle comme la prise d’un emploi ou l’augmentation du taux d’activité. D’autre part, par le versement d’autres prestations en amont, comme des bourses d’étude ou des pensions alimentaires.

La réduction de la charge de travail a permis de réaliser une économie de 4,3 millions de francs pour l’année 2019 (2 millions grâce à la diminution du coût mensuel moyen par dossier et 2,3 millions grâce à l’augmentation des sorties). En soustrayant les coûts de personnel supplémentaires de 1,6 millions de francs, on arrive à une économie nette de 2,7 millions de francs, soit 3,5 % des coûts d’aide sociale de la ville de Winterthur.

> Autres éclairage sur notre rubrique Social >> Aide sociale >> Organisation de l’aide sociale

Au secours ! Je dois me rendre au service social !

L’accueil et les premiers entretiens évalués par les usagères et usagers de l’aide sociale.

Pour son travail de master, Cornelia Lorenz a interrogé les personnes concernées sur le processus d’accueil dans le service social de la commune de Krienz (LU).

Elle replace tout d’abord la procédure formalisée d’accueil (aussi appelée Intake) dans son contexte : dans les années 1990, une augmentation du nombre des dossiers d’aide sociale a poussé certains services à standardiser le premier entretien dans une procédure distincte du suivi ultérieur, en particulier afin de prévenir la perception indue d’aide sociale et de parvenir à une sortie plus rapide du dispositif. Un autre objectif était d’accroître l’efficience de l’aide personnelle.

La procédure d’accueil peut également favoriser ou au contraire permettre de lutter contre le phénomène de non-recours. Selon une étude de l’Office fédéral des statistiques datant de 2009, citée dans le travail de master, 28% des personnes touchées par la pauvreté ne recourent pas à l’aide sociale alors qu’elles y auraient droit. En plus des difficultés liées au sentiment de honte ou à la stigmatisation que peuvent ressentir ces personnes avant de se rendre auprès d’un service social, des éléments comme les horaires d’ouverture du service social, l’accueil, l’aspect général des bureaux et de la salle d’attente exercent une influence sur le taux de non-recours. De ce point de vue également, l’avis des personnes qui se soumettent à ce processus peut s’avérer intéressant.

En ce qui concerne le service social de Kriens, l’étude des questionnaires montre que 88% des usagères et usagers estiment que les horaires du service social sont adéquats : il est souligné qu’une ouverture tardive un jour par semaine et entre midi et deux heures un autre jour permettent aux personnes qui exercent une activité lucrative ou qui ont charge de famille de se rendre plus aisément aux guichets. Ensuite, le premier contact avec le personnel administratif est jugé agréable ou positif par trois quarts des répondant-e-s. 88% d’entre eux estiment également que la discrétion est garantie par l’aménagement de l’espace.

Une petite moitié des personnes concernées disent avoir dû attendre longtemps avant d’obtenir un premier entretien. 67% d’entre elles ont pu participer à un deuxième entretien dans les dix jours après avoir complété leur dossier.

En ce qui concerne la manière dont le deuxième entretien, plus complet, était mené, une grande majorité des usagères et des usagers (91%) estiment que les travailleuses sociales et les travailleurs sociaux ont pris le temps de les écouter. 96% relatent que les informations délivrées étaient compréhensibles. Enfin, 92% disent avoir été bien conseillé-e-s, et 87% se sont senti-e-s pris-e-s au sérieux.

Cornelia Lorenz trouve ces résultats réjouissants pour le service social de Kriens. Ils sont à mettre en parallèle avec la difficulté que représente, pour les personnes concernées, la démarche de se rendre dans un service social : 90% relatent qu’il leur est désagréable de devoir demander de l’aide sociale et 80% d’entre elles se sont rendues auprès du service social lorsqu’elles se trouvaient déjà en grandes difficultés. Si peu d’entreelles ont rencontré des difficultés à réunir les documents demandés (avec ou sans appui d’un-e assistant-e social-e), 80% ont trouvé la procédure intrusive et un peu moins de la moitié a estimé qu’elle était pénible. Ajoutons que les personnes concernées semblent faire la différence entre le processus d’accueil et le personnel administratif et social du service, puisque 90% d’entre elles se sont déclarées satisfaites à leur sujet.

À la suite de cette étude, l’auteure propose des réflexions sur une bonne organisation de l’accueil : en particulier, le premier rendez-vous doit être délivré rapidement, car il permet souvent de répondre à une personne dont les difficultés se sont amplifiées avant qu’elle se décide à pousser la porte du service social. Pour répondre à cette demande, le service doit disposer d’assez de personnel qualifié, et, dans la mesure du possible, fidélisé. Il est important que les assistantes sociales et les assistants sociaux puisse avoir le temps d’accueillir la personne et de faire avec elle un tour d’horizon de sa situation, sans que cela ne prétérite leurs autres tâches. Une dotation suffisante en personnel qualifié répond d’une part aux besoins des employé-e-s du service social et de ses usagères et usagers, mais permet également à ces dernières de sortir plus rapidement du dispositif, lorsqu’un droit à une assurance sociale peut être activé. Enfin, les usagères et usagers du service social devraient être impliqués dans le contrôle de la qualité des prestations.

Lien sur le travail de Master (en allemand)

>Autres éclairage sur notre rubrique Social >> Aide sociale >> Organisation de l’aide sociale

Les bénéficiaires de l’aide sociale en moins bonne santé que le reste de la population

L’Office fédéral de la santé publique (OFSP), constatant que pauvreté et problèmes de santé vont souvent de pair, lance une série d’études dans le but de clarifier l’influence de la pauvreté et du recours à l’aide sociale sur le recours aux prestations de santé. La Haute école spécialisée bernoise et la Haute école des sciences appliquées de Zurich ont été mandatées pour mener une première recherche qui examine la santé des bénéficiaires de l’aide sociale et la compare à celle des allocataires de l’AI, des personnes en situation de pauvreté et du reste de la population.

Profil de santé

Le rapport confirme que les bénéficiaires de l’aide sociale sont en nettement moins bonne santé que le reste de la population. Leur santé est également moins bonne que celle des personnes en situation de précarité qui ne dépendent pas de l’aide sociale. Les différences sont les plus marquées en matière de satisfaction dans la vie et de qualité de vie et pour les problèmes psychiques, en particulier les symptômes dépressifs.

Pour l’équipe de recherche, les résultats indiquent que les bénéficiaires de l’aide sociale se trouvent dans une situation à peine meilleure que les allocataires de l’AI du point de vue de leur santé.

Concernant les comportements de santé et les comportements à risque (comportements alimentaires, activité physique, consommation de tabac ou de cannabis), les données des bénéficiaires de l’aide sociale sont là aussi bien plus mauvaises que celles du reste de la population.

Évolution de la santé

L’étude s’est basée sur des données longitudinales qui ont permis d’observer l’évolution de l’état de santé dans le temps. L’équipe de recherche constate une détérioration de l’état de santé au cours des années qui précèdent l’arrivée à l’aide sociale, avec un pic au moment où les personnes commencent à percevoir l’aide, puis une stabilisation. Une nette amélioration est observée au moment de la sortie de l’aide sociale.

Prestations de santé

Les chercheurs et chercheuses ont observé chez les bénéficiaires de l’aide sociale des statistiques de recours aux prestations de santé comparables à celles des allocataires AI pour toutes les prestations suivantes : consultation d’un médecin généraliste ou spécialiste, urgences ou admission à l’hôpital pour un séjour stationnaire et consultation pour des problèmes psychiques.

En revanche, les bénéficiaires de l’aide sociale renoncent plus souvent à des prestations telles que les soins dentaires, des traitements médicaux urgents et des consultations préventives. Les causes de ces renoncements peuvent être des obstacles financiers ou d’autre nature.

Reprise d’une activité lucrative

Un mauvais état de santé diminue la probabilité de retrouver un emploi. L’étude a montré que cinq ans après l’arrivée à l’aide sociale, 41% des personnes en bonne santé ont commencé ou repris une activité lucrative, ce qui est le cas pour seulement 25% des personnes dont la santé est mauvaise.

En conclusion, les auteurs recommandent que les bénéficiaires de l’aide sociale soient considérés comme un groupe cible des politiques de santé ainsi que la mise en place d’une prise en charge sanitaire précoce et adéquate pour les personnes précaires à la limite de devoir faire appel à l’aide sociale.

Résumé en français du rapport : cliquez ici

> Autres éclairages sur notre rubrique Social >> Pauvreté

« Supported employment »: une nouvelle offre de la Confédération et des cantons pour les 50 ans et plus

Les actifs âgés de 50 ans et plus sont souvent confrontés à des difficultés lorsqu’ils recherchent un emploi. La Confédération et les cantons ont donc décidé de tester une nouvelle mesure de «supported employment» pour les demandeurs d’emploi âgés de 50 ans et plus. L’essai pilote durera trois ans, de 2021 à 2024. Cette nouvelle offre s’adresse aux personnes âgées de 50 ans et plus qui arrivent bientôt en fin de droits et a pour but de les aider à trouver un emploi.

Plus d’informations, voir notre rubrique Travail >> Marché du travail >> 50 ans et plus

Surendettement : le calme avant la tempête ?

L’organisation faîtière Dettes Conseil Suisse (DCS) publie ses statistiques 2019/2020.

Les services de gestion de dettes et de désendettement membres de Dettes Conseil Suisse compilent, en règle générale chaque année, des données relatives aux personnes et aux familles surendettées qui s’adressent à eux.

L’on constate tout d’abord un recul des nouveaux dossiers en 2020 : pendant la pandémie, certains services ont dû fermer et d’autres ont concentré leurs activités sur les consultations sociales et les aides directes, urgentes par rapport aux conseils en matière de dettes.

Si les impacts de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour y faire face n’ont pas encore imprimé de traces statistiques, il n’est pas inutile de rappeler les profils des personnes surendettées qui consultent les services membres de DCS :

Qui consulte ?

Majoritairement des personnes vivant seules (40%). Les couples avec enfants forment un cinquième des dossiers, tout comme les familles monoparentales. Les enfants représentent environ 34% des personnes accompagnées dans une démarche en lien avec le surendettement (que ce soit de la gestion de dettes ou du désendettement). Plus de la majorité des dossiers sont constitués de personnes entre 30 et 49 ans (58%). Plus d’hommes que de femmes consultent (environ 60% – environ 40%) et la plupart des consultants ont un diplôme post-obligatoire (57%). La formation d’un tiers des consultants ne dépasse pas l’école obligatoire.

Un déséquilibre considérable entre les revenus et les dettes

Dans leur majorité, les personnes qui s’adressent à un service de gestion de dettes et de désendettement réalisent un revenu plus bas que la population générale : le revenu médian des ménages suivis se monte à 4’350.- francs par mois et plus de 80% des ménages surendettés gagnent moins que le salaire médian suisse, qui s’élève à 6’500.- francs par mois. 44% d’entre-eux disposent de moins de 4’000.- francs par mois.

Le surendettement moyen des ménages en question s’élève à 65’014.- francs en 2020 et est en augmentation depuis 2019 (60’240.- francs). Les types de dettes les plus répandus sont, comme auparavant, les créances fiscales (73%) et les dettes auprès des assurances-maladies (61%). Le tiers des ménages ont des impayés liés à des factures médicales à leur propre charge, ce qui risque de péjorer leur accès aux soins et leur santé. Enfin, des crédits à la consommation sont présents dans un quart environ des dossiers (24%) et les cartes de crédit dans un peu plus d’un cinquième de ceux-ci (21%).

Les causes du surendettement

Les services membres de DCS constatent que, dans la plupart des cas, le surendettement est dû à une conjonction de facteurs actifs (difficultés de gestion, manque de prévision, prise de risque…) et de facteurs passifs. Parmi ces derniers, le chômage est mentionné comme cause dans 24% des dossiers, la séparation, respectivement le divorce dans 24% des dossiers également et la maladie, les accidents et le handicap dans 23% de ceux-ci. Notons que dans un ménage sur 10, l’insuffisance des revenus (working poor, 11%) a causé le surendettement et que l’échec d’une activité indépendante a poussé 9% des personnes suivies dans le surendettement.

Lien vers les statistiques : cliquez-ici

> Autres éclairages sur notre rubrique Social >> Pauvreté >> Endettement

La pandémie a renforcé les inégalités sociales

Sur mandat de la Plateforme nationale contre la pauvreté, une équipe de recherche du centre de compétences suisse en sciences sociales FORS et de la Haute école de travail social et de la santé Lausanne (HETSL/HES-SO) s’est penchée sur les effets de la pandémie de coronavirus et du semi-confinement sur les conditions de vie.

Les données provenant d’une enquête exceptionnelle menée en mai et juin 2020 du Panel suisse des ménages ont permis aux chercheurs d’analyser la manière dont les personnes avec des ressources financières limitées ont vécu le semi-confinement et la première vague, et dans quelle mesure leur expérience diffère d’autres groupes de population (femmes, jeunes, personnes âgées, etc.).

L’étude démontre que les inégalités sociales déjà existantes ont été accentuées par la crise sanitaire. Les personnes ayant de faibles revenus ont plus fréquemment subi des pertes financières que les autres et ont plus souvent été exposées au risque de devoir puiser dans leurs économies, de se restreindre drastiquement ou de demander des prestations sociales.

Artias – Amanda Ioset, secrétaire générale

> Autres éclairages sous notre rubrique Social >> Pauvreté >> Lutte contre la pauvreté

Entrées en vigueur au 1er juillet 2021 : le point dans le domaine du droit social.

Plusieurs modifications législatives en matière de droit social sont entrées en vigueur ce premier juillet 2021, en particulier :

Les chômeurs et chômeuses âgé-e-s obtiennent une rente-pont fédérale :

Après avoir pris quelque retard en raison de la pandémie, la Loi fédérale sur les prestations transitoires pour chômeurs âgés (LPTra) est entrée en vigueur le 1er juillet 2021. Bâtie sur le modèle des prestations complémentaires, elle octroie à toute personne arrivée en fin de droit à 60 ans et plus et dès son entrée en vigueur, des prestations lui permettant de couvrir d’une part son minimum vital et d’autre part ses frais médicaux et dentaires.

Les parents proches aidants qui travaillent ont droit à un congé de prise en charge de longue durée :

Le deuxième volet de la Loi fédérale sur l’amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches permet le versement d’une allocation de perte de gain (APG) aux parents qui doivent s’absenter de leur travail pour s’occuper d’un enfant gravement malade. Ces dispositions complètent celles entrées en vigueur au
1er janvier 2021, qui règlent les congés de courte durée.

En cas d’hospitalisation du nouveau-né durant deux semaines et plus, les allocations de maternité sont prolongées :

Avant cette modification, aucun revenu n’était garanti aux mères en cas d’hospitalisation prolongée de leur nouveau-né, tout au plus pouvaient-elles demander que le versement de l’allocation de maternité soit ajourné.

Toutes les nouveautés se retrouvent dans les fiches du Guide social romand :

Nouvelle étude de l’OFAS sur les prestations en faveur des familles

En Suisse, les offres d’accompagnement, de conseils et de formation à destination des familles sont nombreuses et variées. Certaines couvrent une large palette de thèmes tandis que d’autres se concentrent sur une problématique, un thème ou un public particulier. Elles sont essentiellement proposées par des organisations à but non lucratif, parfois soutenues financièrement par la Confédération ou les cantons.

Une absence de vue d’ensemble se faisait néanmoins ressentir jusqu’à présent. Un manque que le rapport de recherche de l’OFAS « Prestations en faveur des familles » vient combler. Les auteurs se sont attelés à classifier et documenter systématiquement les offres existantes. De plus, suite à une évaluation des offres, ils ont identifiés huit sujets de préoccupation concernant la disponibilité de ses offres, leur accessibilité, leur qualité et leur capacité à toucher le public cible.

Le manque d’offres proposées à domicile pour les familles socialement défavorisées ainsi que les obstacles linguistiques et culturels figurent parmi les préoccupations principales.

> Autres éclairages sur notre thème Familles >> Politique familiale >> Réflexions générales

Rapport statistique sur les familles : un cinquième des ménages monoparentaux soutenu par l’aide sociale

Établi par l’Office fédéral de la statistique (OFS), le rapport statistique 2021 sur les familles en Suisse apporte un éclairage sur différents aspects de la situation des familles : formes de vie en commun, relations de couple, répartition des tâches domestiques ou encore violence domestique. Dans cette brève recension, nous nous concentrons sur les résultats du rapport en matière de situation financière des ménages, de pauvreté et de recours à l’aide sociale, en particulier pour les ménages monoparentaux.

Situation financière des ménages monoparentaux

En Suisse, les ménages monoparentaux représentent 16% des ménages familiaux avec enfants. Il s’agit le plus souvent de mères seules (83%), plus rarement de pères seuls (17%). Pour ce qui est de leur situation financière (revenu disponible équivalent),  ils affichent le niveau de vie le plus bas avec les ménages de couples avec trois enfants ou plus. Ce constat correspond à leur évaluation subjective de la situation, puisque ces deux formes de ménage déclarent nettement plus souvent que les autres avoir des difficultés à joindre les deux bouts.

Endettement

De manière générale, l’endettement des personnes vivant dans des ménages comptant des enfants est plus important que celui des personnes vivant dans d’autres formes de ménage (une personne seule ou couple sans enfants). 36% des personnes vivant dans des ménages monoparentaux sont concernées par des arriérés de paiement (non-paiement de factures faute de moyens financiers), deux fois plus que pour les ménages sans enfants.

En 2017, 7,3% de la population vivait dans un ménage ayant eu au moins un arriéré sur les primes d’assurance-maladie au cours des douze derniers mois, un taux qui s’élevait à 16% pour les personnes vivant dans un ménage monoparental (à titre de comparaison, le taux est de 9,9% pour les couples avec enfants et de 4,9% pour les couples de moins de 65 ans sans enfants).

Pauvreté et risque de pauvreté

Le rapport confirme que les personnes de moins de 65 ans vivant seules et les ménages monoparentaux sont les plus touchés par la pauvreté (taux de pauvreté de respectivement 11% et 19%). Par ailleurs, les personnes vivant en couple avec trois enfants ou plus sont davantage touchés par la pauvreté que celles en couple avec un seul enfant (10% contre 2,6%).

28% des personnes vivant dans des ménages monoparentaux et 13% des personnes vivant dans des ménages de couples avec enfants sont considérés comme à risque de pauvreté. En cas de légère détérioration de leur revenu ou d’un changement de la situation familiale, elles risquent de basculer immédiatement au-dessous du minimum vital social calculé par l’OFS.

Quant au taux de privation matérielle, il est particulièrement élevé chez les personnes vivant dans des ménages monoparentaux (20%). Cette privation peut se manifester par différentes « incapacités »: à faire face, dans un délai d’un mois, à une dépense imprévue de 2500 francs, à partir chaque année une semaine en vacances, à disposer des moyens financiers qui permettent de posséder une voiture. Pour compléter, ajoutons que le rapport révèle aussi que les privations liées au logement sont plus fréquente chez les ménages monoparentaux et qu’en 2018, 7,8% de personnes vivant dans ce type de ménage ont dû renoncer à des soins médicaux nécessaires pour des raisons financières (3,2% dans la population générale de plus de 16 ans).

Recours à l’aide sociale

En 2019, le taux d’aide sociale était de 3,2% pour la population générale, tandis qu’il se montait à 21,2% des ménages monoparentaux, soit nettement plus que pour toutes les autres formes de ménages. Dans la très grande majorité des cas, la cheffe d’une famille monoparentale bénéficiant de prestations d’aide sociale est la mère (93%). Selon le rapport, la difficulté pour ces familles est d’organiser la garde des enfants afin de pouvoir trouver un travail ou augmenter leur revenu. Par ailleurs, la majorité n’a achevé qu’une formation obligatoire, ce qui rend difficile une sortie de l’aide sociale grâce à un emploi suffisamment rémunéré.

Artias – Amanda Ioset, secrétaire générale

Travail social : le risque d’épuisement émotionnel a augmenté pendant la pandémie

Une équipe de recherche de la Haute école de travail social FHNW s’est penchée sur les effets de la pandémie de covid-19 sur le travail social dans une étude mandatée par l’association professionnelle AvenirSocial. 3’507 professionnel-le-s du travail social ont répondu à un sondage en ligne pendant la deuxième vague (du 10 décembre 2020 au 7 janvier 2021). Il en ressort en particulier une augmentation du risque d’épuisement émotionnel et une dégradation de la santé des travailleuses et des travailleurs du secteur social.

De manière générale, la pandémie a eu un impact important sur le domaine du travail social. La plupart des institutions sociales en Suisse sont restées ouvertes durant la deuxième vague et les processus de travail ont été adaptés afin de limiter les contacts et permettre le respect des règles sanitaires. Au moment de la récolte des données, plus d’un tiers des professionnel-le-s étaient au moins partiellement en télétravail.

La pandémie a eu un effet important sur la communication et les interactions dans le travail social. 80% des personnes sondées ont constaté des changements dans la communication avec les bénéficiaires, changements perçus généralement de manière négative. Les modifications de la communication avec les collègues et les partenaires sont également principalement vécues comme étant négatives.

Les résultats empiriques de l’étude montrent clairement que la charge de travail est de manière générale élevée pour les professionnel-le-s du social. Plus de 60% des répondant-e-s définissent leur charge de travail comme éprouvante (45.4%) voire très éprouvante (17.2%). Si une majorité semble disposer des ressources nécessaires pour faire face au stress au travail, 31.3% des personnes interrogées font face à un risque élevé d’épuisement émotionnel (« burn-out »), un indicateur que l’équipe de recherche considère comme préoccupant. A noter que 55.6% des répondant-e-s romand-e-s reconnaissent être de plus en plus épuisé-e-s émotionnellement au travail, contre 28.3% pour les participant-e-s alémaniques, ce que l’équipe de recherche explique par le fait que la Suisse romande a été plus touchée par la pandémie et par les changements des conditions de travail qui l’ont accompagnée.

Les résultats indiquent que la pandémie a eu un impact négatif sur l’état de santé des professionnel-le-s. Celui-ci est évalué comme bon à très bon par 79.2% des répondant-e-s, ce qui représente une détérioration par rapport à la dernière enquête suisse sur la santé de l’OFS (2017), selon laquelle 88.7% des personnes travaillant dans le domaine social jugeaient leur santé bonne à très bonne.

Selon l’équipe de recherche, la situation de santé des professionnel-le-s du social est globalement inquiétante. Quant à l’association AvenirSocial, mandataire de l’étude, elle demande « davantage de ressources, sous forme de personnel et de moyens financiers » pour faire face aux défis que le travail social devra affronter dans un avenir proche.

Lien vers l’étude (en allemand).

Lien vers le communiqué d’AvenirSocial.

> Autres éclairages sur notre thème Perspectives >> Travail social