Les interrogations sur le travail social sont aussi anciennes que le travail social lui-même. Depuis quelque temps, les critiques dont il fait l’objet sont toutefois devenues massives et multiples. On le dit trop cher et inefficace, mal organisé, non coordonné, réfractaire aux réformes. Ses prestations seraient trop généreuses, il tolérerait de nombreux abus et favoriserait la déresponsabilisation des personnes, faux invalides, faux chômeurs, faux pauvres qui « se prélassent dans le hamac social » selon l’expression alémanique.
Ces controverses peuvent se comprendre si on se situe dans le contexte de la précarisation des conditions d’emploi et de la remise en cause de l’Etat social qui transforment profondément la société. Elles rendent nécessaire l’étude d’anciennes questions de l’action sociale : qui doit-on aider, comment faut-il aider, et qui est responsable de l’aide ? Doit-on aider tout le monde ou seulement ceux et celles qui le méritent ? L’aide est-elle un droit ou une dette, et quels devoirs implique-t-elle pour celui ou celle qui en bénéficie ? Comment concilier l’aide et le contrôle ?
Faut-il aider avec de l’argent ou procurer un emploi ? Que faire lorsqu’il n’y a pas d’emploi ? Qui doit aider, la famille, la commune ou l’Etat ? Des assistantes sociales, du personnel administratif, des élus politiques ? Vieux débats sur la solidarité, sur la démocratie, « sur la dette de la société envers les pauvres et sur celle des pauvres à l’égard de la société, sur les « bons » et les « mauvais » pauvres » (Dubet, 2002, 234).
Ce dossier apporte quelques éléments de réponse à ces questions. Il est fondé sur une étude comparative des services d’aide sociale des villes de Zurich et de Bâle et des cantons de Genève et de Vaud qui vient d’être publiée par les Cahiers de l’éésp.