Après la loi, l’ordonnance : la base légale qui légitime la surveillance dans les assurances sociales, présentée dans plusieurs documents de l’ARTIAS[1] reçoit ses dispositions d’application[2]. L’entrée en vigueur est fixée au premier septembre 2019 au plus tôt. Elle est conditionnée aux recours déposés devant le Tribunal fédéral qui portent sur la votation populaire sur l’observation des assurée-e-s.
D’après le nouvel article 43a, al.9, let. a à c de la Loi sur la partie générale des assurances sociales (nLPGA), dont l’entrée en vigueur dépend également du sort des recours auprès du Tribunal fédéral, les questions à régler au niveau de l’ordonnance sont les suivantes :
– la procédure selon laquelle l’assuré peut consulter le matériel complet recueilli lors de l’observation ;
– la conservation et la destruction du matériel recueilli ;
– les exigences à l’endroit des personnes chargées de l’observation
Pour être éligible aux mandats des assureurs, le ou la détective doit obtenir une autorisation de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), instituée également autorité de surveillance en matière d’observations secrètes. L’autorisation sera valable cinq ans et ne pourra être produite à des fins publicitaires. Cette autorisation est assortie d’exigences (relatives à l’absence de condamnations et de poursuites et aux connaissances pratiques et théoriques, art. 7b nOPGA). L’autorisation peut être retirée si les conditions d’octroi ne sont plus remplies. La formation demandée pour pouvoir solliciter des mandats des assureurs sociaux sera organisée par l’OFAS et l’institut suisse de police ; des dispositions transitoires règlent l’entre-temps.
Les observations ne pourront être effectuées qu’en des lieux librement accessibles, ou visibles depuis des lieux librement accessibles, par exemple dans l’espace public ou dans un magasin. L’intérieur d’un bâtiment d’habitation, y compris les pièces visibles à travers une fenêtre ne sont pas considérés comme librement accessibles, tout comme les cours et les jardins protégés des regards extérieurs par une haie ou une palissade, donc qui ne sont normalement pas visibles de l’extérieur.
Utiliser un GPS sera autorisé, par contre, l’utilisation de téléobjectifs, lunettes de vision nocturne, puces, micros directionnels ou drones sera interdite. En revanche, des instruments qui n’améliorent que légèrement la vue ou l’audition sont admissibles.
Par ailleurs, la sécurité et la confidentialité des données doivent être garanties et leur destruction contrôlée. Les assureurs devront informer les personnes concernées (par oral ou par écrit) qu’elles ont fait l’objet d’une observation et leur remettre, sur demande, une copie de l’intégralité du matériel recueilli. Elles auront également la possibilité de demander à un tribunal de vérifier la légalité de cette observation.
Ajoutons ici que l’illicéité d’une preuve ne la rend pas inexploitable : le Tribunal fédéral estime que des preuves obtenues de manière illicite peuvent être exploitables. Les intérêts privés, par exemple celui du respect de la sphère privée dans le cas d’une observation, sont mis en balance avec l’intérêt public d’éviter les fraudes à l’assurance. Si la pesée des intérêts s’examine au cas par cas, il faut souligner que la jurisprudence accorde un grand poids à l’intérêt public[3].
Relevons à ce sujet que l’OFAS a la compétence de retirer l’autorisation à un-e détective qui aura effectué une observation non conforme au droit (art. 7e, al.3, let.a nPLGA) ; l’avenir montrera de quelle manière l’OFAS exercera son rôle de surveillance, alors que de nombreuses observations pourraient être exécutées sur mandat de l’assurance-invalidité, dont le pilotage ressort des attributions de ce même office.
[1] https://www.artias.ch/artias_veille/6735/
[2] Il s’agit de l’ordonnance sur la partie générale des assurances sociales, OPGA.
[3] Pour en savoir plus, cf. Célian Hirsch, Les observations illicites sont-elles exploitables ? In : Jusletter, 19 février 2018.