Le Tribunal fédéral a rendu le 19 mai un arrêt, destiné à publication, concernant l’exclusion de l’aide sociale des chercheurs d’emploi de l’UE/AELE (arrêt du TF 8C_395/2014 du 19 mai 2015).
Faits
A., de nationalité française, est arrivé en Suisse en 2007. Une autorisation de séjour UE/AELE de courte durée (permis L) lui a été délivrée en septembre 2007. Il a exercé plusieurs emplois de courte durée et d’autres « permis L » lui ont ensuite été accordés. Depuis avril 2012, il travaillait comme automaticien dans le cadre d’une mission temporaire et il bénéficiait d’un « permis L » jusqu’au 12 mai 2013.
Le 3 avril 2013, A. a été placé en détention à la suite d’une enquête pénale. Le 23 avril, son employeur a alors constaté qu’il avait mis fin de manière abrupte à son emploi.
A. a demandé une aide financière afin de pouvoir régler son loyer. Par décision du 7 juin 2013, le centre social a refusé de lui accorder des prestations financières sous la forme du revenu d’insertion. Au mois de juin, A. a été libéré de détention. Il a perçu des indemnités de chômage durant trois jours contrôlés, puis a commencé une nouvelle mission temporaire comme électricien-cableur et obtenu le renouvellement de son « permis L ». Il a recouru contre la décision du 7 juin en concluant à l’octroi du RI pour les mois d’avril à juin 2013.
Droit
Le Tribunal fédéral indique que l’accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) permet à la Suisse d’exclure de l’aide sociale les chercheurs d’emploi (au sens de l’art. 2 par. 1 al. 2 Annexe 1 ALCP). Les chercheurs d’emploi sont non seulement des ressortissants de l’UE/AELE qui viennent en Suisse pour y trouver du travail, mais également ceux qui y ont déjà travaillé pour une durée inférieure à douze mois et y demeurent afin de retrouver un emploi.
Cette catégorie de chercheurs d’emplois « vise aussi les cas de perte prématurée de l’emploi, c’est-à-dire avant l’expiration de la durée prévue de l’engagement. Dans ces situations de perte d’emploi, l’intéressé peut encore rester six mois en Suisse pour y chercher du travail. Il n’a pas droit à l’aide sociale, mais seulement à l’aide d’urgence. Les cantons sont toutefois libres d’accorder des prestations plus étendues. »
Le Tribunal fédéral a rappelé qu’il faut toutefois réserver l’application de l’art. 6 par. 6 Annexe I ALCP, selon lequel le titre de séjour en cours de validité ne peut être retiré au travailleur salarié du seul fait qu’il se trouve en situation de chômage involontaire. Cette disposition doit être considérée comme permettant à un chômeur de conserver son ancienne qualité de travailleur ainsi que les droits qui découlent de cette qualité, en particulier l’aide sociale (voir sur ce point notre analyse de l’arrêt du Tribunal fédéral, 2C_390/2013, du 10 avril 2014 et ATF 141 II I, consid. 2).
Le Tribunal fédéral a jugé qu’en l’espèce :
- Placé en détention, A. n’est pas « en situation de chômage involontaire », au sens de l’art. 6 par. 6 Annexe I ALCP ;
- La situation de A. était assimilable à celle d’un chercheur d’emploi, au sens de l’art. 2 par. 1 al. 2 Annexe 1 ALCP.
A. pouvait donc, conformément à l’ALCP, être exclu de l’aide sociale.
Pour rappel, le Conseil fédéral a mis en consultation l’année passée un avant-projet de modification de loi afin:
- d’exclure de l’aide sociale, au niveau fédéral, les ressortissants de l’UE/AELE qui viennent en Suisse pour chercher un emploi;
- de définir quand les ressortissants de l’UE/AELE qui exerçaient une activité lucrative perdent leur qualité de travailleur et leur droit au séjour en cas de chômage involontaire (notre analyse du projet mis en consultation).
Le Tribunal fédéral a résumé cet avant-projet, sans y émettre de critique.
Depuis le 1er avril 2015, les personnes qui viennent en Suisse pour chercher un emploi obtiennent (si la recherche d’emploi prend plus de trois mois) une autorisation de séjour de courte durée UE/AELE de trois mois par année civile, seulement s’ils bénéficient des moyens financiers nécessaires à leur entretien (art. 18 al. 2 OLCP). Le reste du projet mis en consultation fera l’objet d’un message du Conseil fédéral prévu pour cette année.
Artias – Yvan Fauchère